L'Homme qui en savait trop d'Alfred Hitchcock : Saint-Moritz ou Marrakech ?

Ce mois-ci, privé de Festival de Cannes, Arte fait à nouveau son cinéma. A cette occasion, bon nombre de films qui ont été projetés sur la Croisette sont proposés en replay. Alors que les salles obscures ne sont pas encore ouvertes, c’est l’occasion d’en profiter pour voir ou revoir à la maison L’homme qui en savait trop, d’Alfred Hitchcock, réalisé par le maître du suspense en 1934, puis dans une seconde version en 1956.





Deux films, deux époques, un même titre, un même réalisateur. Dans un lieu de villégiature à la mode, un couple fait la connaissance d’un agent secret qui, avant d’être assassiné sous leurs yeux, leur fait cette terrible confidence : un meurtre politique sera bientôt commis à Londres.
 
Pour les empêcher de tout révéler à la police, certains membres de l’organisation criminelle, présents sur les lieux, enlèvent leur enfant et nos deux héros partent à Londres au plus vite pour, à la fois retrouver leur progéniture et essayer d’empêcher le pire…
 
Un scénario commun, donc, dans les deux versions. L’espion s’appelle Louis Bernard, il est Français et est joué par deux acteurs français : Pierre Fresnais en 1934 et Daniel Gélin en 1956. Les malfaiteurs se cachent à Londres dans un édifice religieux dans les deux versions.
 
Le meurtre qui est projeté se passe à l’Albert Hall, lors d’une soirée de gala où on donne la même cantate Storms Cloud Cantata, d’Arthur Benjamin. Et le fameux coup de cymbale dont doit profiter le tueur pour commettre son forfait est déjà présent dans la première version.
 
Mais vingt ans les séparent, 1934 pour la première, 1956 pour la seconde. Le noir et blanc inquiétant de la version d’avant-guerre est remplacé par le Technicolor éclatant qui vient alors de faire son apparition sur les pellicules.

De Saint Moritz en hiver nous passons à Marrakech au printemps, le couple d’Anglais devient américain, un jeune médecin et son épouse chanteuse à la mode illustrant bien cette middle class qui fait son apparition. L’enfant, une petite fille sage et effacée chez les anglais, devient un petit garçon bien yankee comme on en voyait beaucoup à l’époque.
 
La version de 1934 souffre des travers de nombreux films de l’époque : un certain manque de rythme paradoxal quand on remarque qu’elle est plus courte que la seconde- sans doute dû au passage au parlant pas encore totalement maîtrisé par un réalisateur talentueux, mais encore à ses débuts. La scène de la fusillade finale, où on s’ennuie un peu, est éloquente à cet égard.
 
Rien de tout cela dans la deuxième version, presque deux fois plus longue, où l’affaire est menée tambour battant du début jusqu’à la fin ; n’oubliant pas l’humour, dans la toute dernière scène par exemple.
 
Humour par contre un peu douteux lorsque, au début du film, le bon médecin et son épouse, dans les souks de Marrakech, se remémorent les gains générés par certains patients du praticien et ce que cet argent leur a permis d’acheter... On ne tournerait plus une telle scène de nos jours, c’est certain.
 
A qui la palme ? Au deux ! Indubitablement à Peter Lorre pour son rôle du méchant de la version anglaise, et au couple James Stewart/Doris Day pour la version américaine, avec bien sûr la fameuse chanson Que sera, sera…
 
Alex Kiev

A revoir en replay
La version de 1934 sur You tube
La version de 1956 sur Arte

Article publié le 25/05/2020 à 01:00 | Lu 2026 fois