En termes de diagnostic de la douleur associée aux maladies rhumatismales, avez-vous l’impression qu’il y a eu des progrès ?
JS : Il est très compliqué d’avoir des marqueurs biologiques objectifs de la douleur, et probablement il n’y aura jamais un dosage sanguin comme une vitesse de sédimentation qui nous permette de « doser » la douleur. Là encore, finalement le meilleur indicateur, c’est ce que nous dit le patient !
Après, il existe des méthodes d’investigation des mécanismes de la douleur, ce qu’on appelle les tests de sensibilité à la douleur.
Depuis plusieurs années, on peut aussi les explorer avec des IRM fonctionnelles cérébrales, mais ces explorations restent encore dans le domaine de la recherche, sans utilisation en pratique clinique courante.
Dans le cadre du soin, il faut rester réaliste : quelques questions bien posées et une bonne écoute du patient, c’est ce que l’on peut faire de mieux avant que l’intelligence artificielle ne nous dépasse !
En termes de traitements et de prise en charge de la douleur, que pouvez-vous nous dire ?
JS : Je pense qu’il y a eu une prise de conscience encore plus forte ces dernières années que l’activité physique fait partie du traitement de la douleur (et ceci repose bien sûr en partie sur la motivation et les envies du patient).
Cela a été confirmé à de nombreuses reprises par des publications scientifiques de qualité, à tel point que l’on dit maintenant qu’il n’y a même plus besoin de faire d’études pour montrer l’intérêt de l’activité physique dans l’arthrose du genou !
Concernant les traitements, il est important de rappeler que la douleur est un symptôme dans le cas des maladies rhumatismales.
Par exemple, dans le cas d’une polyarthrite rhumatoïde, d’un rhumatisme psoriasique, le fait de donner un traitement de fond (un immunosuppresseur à faible dose tel que le méthotrexate, une biothérapie comme un anti-TNF, …) permet de bloquer l’inflammation et par là même d’atténuer voire éteindre la douleur.
En traitant la cause de la douleur, on agit par conséquent sur cette dernière.
Dans d’autres affections, telles que l’arthrose ou la fibromyalgie, il n’y a pas de traitement de la cause. On soigne alors les symptômes dont la douleur à l’aide de médicament antalgique.
Un des enjeux dans les années à venir est de trouver un traitement de fond de l’arthrose capable de ralentir la progression de la maladie, pour aller au-delà du soulagement du symptôme.
En termes de traitements antalgiques, il n’y a malheureusement pas eu de grandes avancées mais on les manie quand même mieux.
On a frôlé une avancée thérapeutique, lors de récents essais cliniques évaluant une biothérapie ciblant une molécule appelée le « facteur de croissance nerveuse » ou NGF (acronyme de l’appellation anglophone Nerve Growth Factor).
Mais ces derniers n’ont finalement pas abouti : ces composés, bien qu’efficaces, ont été associés à des problèmes de tolérance importants chez une minorité de patients (sans qu’on puisse prédire par avance lesquels) ce qui a conduit à l’arrêt de leur développement.
Enfin, une autre approche qui semble prometteuse est celle associée à tous les systèmes de stimulation trans-crânienne.
C’est cette approche qui est activement développée par l’équipe du Dr Bouhassira (voir suite de l’entretien des experts).
Que pensez-vous des approches non médicamenteuses pour la prise en charge de la douleur ?
JS : J’aborde systématiquement ce sujet lors de mes consultations : traiter les rhumatismes, ce n’est pas une simple ordonnance de médicaments, cela serait trop simple…
Evidemment il y a l’activité physique, mais aussi l’alimentation et le contrôle du poids. Attention, pas de régime « miracle », mais une alimentation équilibrée non privative qui évitera les aliments ultra-transformés et qui fera la part belle aux fibres et oméga 3 aidera au sein d’une véritable « médecine du mode de vie ».
Pour certaines techniques non médicamenteuses telles que le Taï-Chi, l’acupuncture, la sophrologie, la cohérence cardiaque, ou l’hypnose, il est vrai que la difficulté en France reste le coût et l’accès. Or, les patients peuvent s’aider de ces techniques qui aident à gérer le stress, la fatigue ou encore la douleur ...
Il y a notamment des études très bien faites qui montrent le bénéfice de thérapies du type thérapies cognitivo--comportementales (TCC) ou taïchi, voire même l’acupuncture.
Par exemple, des études sérieuses évaluant le Taï-chi dans l’arthrose du genou ont été publiées. Cela ne veut bien sûr pas dire que ces approches non médicamenteuses vont tout régler et que la prise en charge se résume à cela !
Elles permettent d’augmenter les chances pour un patient de se sentir bien.
Pour mener à bien cette approche globale allant des médicaments aux approches non édicamenteuses, et même au mode de vie en général, il ne faut pas sous-estimer l’implication des patients ! Une difficulté, en tant que médecin, est lorsque les patients sont dans une attitude attentiste, attendant le comprimé miracle (qui n’existe pas) !
Une des clés est que le patient soit acteur de sa propre prise en charge, acteur de son projet de santé., qu’il se sente en maitrise et finalement « prenne le pouvoir » sur son rhumatisme. Cela ne le guérira pas, mais cela lui permettra de mieux vivre avec.
En conclusion, j’insisterais sur le fait que la prise en charge de la douleur chez un patient ce n’est pas juste une liste de médicaments sur une ordonnance, il faut dans un premier temps trouver le rhumatisme sous-jacent et analyser la douleur et son retentissement. La prise en charge de la douleur sera « multimodale » avec un patient actif.
Cela signifie que la prise en charge s’étendra depuis l’activité physique jusqu’à l’acupuncture en passant par une infiltration et/ou un traitement de fond : tout cela à adapter au cas par cas. Il n’y a pas de comprimé miracle…mais il y a plein de choses à faire !
JS : Il est très compliqué d’avoir des marqueurs biologiques objectifs de la douleur, et probablement il n’y aura jamais un dosage sanguin comme une vitesse de sédimentation qui nous permette de « doser » la douleur. Là encore, finalement le meilleur indicateur, c’est ce que nous dit le patient !
Après, il existe des méthodes d’investigation des mécanismes de la douleur, ce qu’on appelle les tests de sensibilité à la douleur.
Depuis plusieurs années, on peut aussi les explorer avec des IRM fonctionnelles cérébrales, mais ces explorations restent encore dans le domaine de la recherche, sans utilisation en pratique clinique courante.
Dans le cadre du soin, il faut rester réaliste : quelques questions bien posées et une bonne écoute du patient, c’est ce que l’on peut faire de mieux avant que l’intelligence artificielle ne nous dépasse !
En termes de traitements et de prise en charge de la douleur, que pouvez-vous nous dire ?
JS : Je pense qu’il y a eu une prise de conscience encore plus forte ces dernières années que l’activité physique fait partie du traitement de la douleur (et ceci repose bien sûr en partie sur la motivation et les envies du patient).
Cela a été confirmé à de nombreuses reprises par des publications scientifiques de qualité, à tel point que l’on dit maintenant qu’il n’y a même plus besoin de faire d’études pour montrer l’intérêt de l’activité physique dans l’arthrose du genou !
Concernant les traitements, il est important de rappeler que la douleur est un symptôme dans le cas des maladies rhumatismales.
Par exemple, dans le cas d’une polyarthrite rhumatoïde, d’un rhumatisme psoriasique, le fait de donner un traitement de fond (un immunosuppresseur à faible dose tel que le méthotrexate, une biothérapie comme un anti-TNF, …) permet de bloquer l’inflammation et par là même d’atténuer voire éteindre la douleur.
En traitant la cause de la douleur, on agit par conséquent sur cette dernière.
Dans d’autres affections, telles que l’arthrose ou la fibromyalgie, il n’y a pas de traitement de la cause. On soigne alors les symptômes dont la douleur à l’aide de médicament antalgique.
Un des enjeux dans les années à venir est de trouver un traitement de fond de l’arthrose capable de ralentir la progression de la maladie, pour aller au-delà du soulagement du symptôme.
En termes de traitements antalgiques, il n’y a malheureusement pas eu de grandes avancées mais on les manie quand même mieux.
On a frôlé une avancée thérapeutique, lors de récents essais cliniques évaluant une biothérapie ciblant une molécule appelée le « facteur de croissance nerveuse » ou NGF (acronyme de l’appellation anglophone Nerve Growth Factor).
Mais ces derniers n’ont finalement pas abouti : ces composés, bien qu’efficaces, ont été associés à des problèmes de tolérance importants chez une minorité de patients (sans qu’on puisse prédire par avance lesquels) ce qui a conduit à l’arrêt de leur développement.
Enfin, une autre approche qui semble prometteuse est celle associée à tous les systèmes de stimulation trans-crânienne.
C’est cette approche qui est activement développée par l’équipe du Dr Bouhassira (voir suite de l’entretien des experts).
Que pensez-vous des approches non médicamenteuses pour la prise en charge de la douleur ?
JS : J’aborde systématiquement ce sujet lors de mes consultations : traiter les rhumatismes, ce n’est pas une simple ordonnance de médicaments, cela serait trop simple…
Evidemment il y a l’activité physique, mais aussi l’alimentation et le contrôle du poids. Attention, pas de régime « miracle », mais une alimentation équilibrée non privative qui évitera les aliments ultra-transformés et qui fera la part belle aux fibres et oméga 3 aidera au sein d’une véritable « médecine du mode de vie ».
Pour certaines techniques non médicamenteuses telles que le Taï-Chi, l’acupuncture, la sophrologie, la cohérence cardiaque, ou l’hypnose, il est vrai que la difficulté en France reste le coût et l’accès. Or, les patients peuvent s’aider de ces techniques qui aident à gérer le stress, la fatigue ou encore la douleur ...
Il y a notamment des études très bien faites qui montrent le bénéfice de thérapies du type thérapies cognitivo--comportementales (TCC) ou taïchi, voire même l’acupuncture.
Par exemple, des études sérieuses évaluant le Taï-chi dans l’arthrose du genou ont été publiées. Cela ne veut bien sûr pas dire que ces approches non médicamenteuses vont tout régler et que la prise en charge se résume à cela !
Elles permettent d’augmenter les chances pour un patient de se sentir bien.
Pour mener à bien cette approche globale allant des médicaments aux approches non édicamenteuses, et même au mode de vie en général, il ne faut pas sous-estimer l’implication des patients ! Une difficulté, en tant que médecin, est lorsque les patients sont dans une attitude attentiste, attendant le comprimé miracle (qui n’existe pas) !
Une des clés est que le patient soit acteur de sa propre prise en charge, acteur de son projet de santé., qu’il se sente en maitrise et finalement « prenne le pouvoir » sur son rhumatisme. Cela ne le guérira pas, mais cela lui permettra de mieux vivre avec.
En conclusion, j’insisterais sur le fait que la prise en charge de la douleur chez un patient ce n’est pas juste une liste de médicaments sur une ordonnance, il faut dans un premier temps trouver le rhumatisme sous-jacent et analyser la douleur et son retentissement. La prise en charge de la douleur sera « multimodale » avec un patient actif.
Cela signifie que la prise en charge s’étendra depuis l’activité physique jusqu’à l’acupuncture en passant par une infiltration et/ou un traitement de fond : tout cela à adapter au cas par cas. Il n’y a pas de comprimé miracle…mais il y a plein de choses à faire !