Fin de vie : le CESE pour un droit à recevoir une sédation profonde explicitement létale

En novembre 2017, le Conseil économique social et environnemental (CESE), avait constaté que plusieurs pétitions citoyennes portant sur la question de la fin de vie avaient recueilli un très grand nombre de signatures (plus de 350 000), signe que ce sujet préoccupe les Français.


En outre, le débat autour de cette question s’est intensifié depuis un an avec l’adoption de la loi Claeys-Léonetti en 2016, puis l’ouverture le 18 janvier dernier des Etats généraux de la bioéthique et l’appel de 156 députés pour une nouvelle loi publié début mars.
 
Dans ce contexte, le CESE a souhaité contribuer de manière apaisée à un débat parfois clivant en se saisissant du sujet. Après quatre mois de travail, il a voté son avis « Fin de vie : la France à l’heure des choix ». Parmi ses préconisations phares, le CESE souhaite l’adoption d’une loi sur « les derniers soins », le renforcement de l’information et également un meilleur soutien et contrôle de l’accompagnement en fin de vie.
 
Une volonté de voir adoptée une loi sur « les derniers soins »
Le CESE rappelle l’importance du respect de la dignité humaine et donc de la liberté de formuler ses choix, de les faire évoluer mais aussi, le moment venu, de les faire respecter.
 
Après plus de quarante auditions et des échanges constructifs entre toutes les forces représentées au CESE, le Conseil souhaite voir ajouter aux droits aujourd’hui reconnus à la personne malade celui de pouvoir demander au médecin, y compris grâce la rédaction de directives anticipées ou la désignation d’une personne de confiance, de recevoir, dans des conditions strictement définies, une sédation profonde explicitement létale.
 
Pour les professionnels médicaux et eu égard à la sensibilité du sujet, le CESE se prononce en faveur de la mise en place d’une clause de liberté de conscience permettant à tout médecin de refuser de prescrire une sédation profonde explicitement létale, sous réserve de transférer le dossier à un autre médecin choisi par le patient.
 
Concernant les soins palliatifs non létaux, le CESE propose un accès facilité à ces soins en autorisant la prescription par la médecine de ville et la dispensation en pharmacie de ville des médicaments nécessaires à la sédation profonde et continue.
 
Un nécessaire renforcement de l’information et de l’appropriation de la réglementation actuelle
Cet avis ne peut être résumé à la préconisation de l’adoption d’une nouvelle loi sur la fin de vie. Le CESE souhaite, dans un premier temps, pallier le faible niveau d’information constaté sur ces sujets du grand public et de l’ensemble des parties prenantes (les professionnels de santé, les gestionnaires d’établissements de santé et d’établissements médico-sociaux, les acteurs associatifs, le personnel administratif et politique).
 
C’est pourquoi le CESE préconise de renforcer la formation initiale des professionnels de la santé et du soin pour assurer la place des soins palliatifs et de l’accompagnement des personnes en fin de vie.
 
Plus globalement, le CESE recommande de lancer, sous l’égide du ministère des Solidarités et de la Santé, dans le cadre du plan national de développement des soins palliatifs 2019-2021, une campagne grand public d’information et d’appropriation de la réglementation en vigueur en matière de droits de la personne en fin de vie et de modalités d’exercice de ces droits (notamment directives anticipées et personne de confiance) et déclarer l’accompagnement de la fin de vie « grande cause nationale » en 2020.
 
 
Un meilleur soutien et contrôle de l’accompagnement en fin de vie
Le Conseil, conscient de la sensibilité du sujet et de la révolution culturelle que pourrait constituer l’adoption d’une nouvelle réglementation autour de la fin de vie, préconise une évaluation de la loi sur « les derniers soins ».
 
Elle inclurait les conséquences de la clause de conscience sur l’effectivité du droit et devrait être prévue dans un délai situé entre trois et cinq ans après son adoption.
 
Un meilleur accompagnement des patients est constitué, selon le CESE, par un meilleur soutien aux moyens humains et financiers accordés aux soins palliatifs et à l’accompagnement en fin de vie. Il s’agirait de doter le prochain plan national de développement des soins palliatifs (2019-2021) d’un budget permettant de résorber les retards constatés dans les territoires et de répondre aux besoins par l’augmentation de l’offre de soins palliatifs à l’hôpital de 20 à 40% par rapport à l’existant.
 
Cet effort financier doit se poursuivre par l’augmentation des moyens consacrés à la recherche scientifique en matière de soins palliatifs d’accompagnement et de fin de vie.
 
Enfin, en amont de la réforme de la tarification à l’activité́ (T2A) annoncée par le Gouvernement, le CESE préconise d’exclure les soins palliatifs à l’hôpital de la tarification à l’activité (T2A) en prenant mieux en compte le temps requis par ce type de soins.
 
 
Cet avis rapporté par Pierre-Antoine Gailly (Groupe des entreprises) pour la Commission temporaire sur la fin de vie du CESE, présidée par Jean-François Naton (Groupe CGT), a été présenté lors de l’assemblée plénière du Conseil économique, social et environnemental du 10 avril à 14h.
 
L’avis a été adopté en plénière avec 107 voix pour, 44 abstentions et 18 voix contre.

Publié le 11/04/2018 à 01:00 | Lu 2176 fois