Ecole Thermale du stress et troubles du sommeil : le point avec le Dr Patrick Lemoine

A partir de juin, les Thermes de Saujon (Charente-Maritime) proposeront une nouvelle réponse thérapeutique efficace, non médicamenteuse et sans danger à l'un des fléaux du siècle, le trouble du sommeil. Le point avec le Dr Patrick Lemoine qui a élaboré ce nouveau protocole.





A partir de quand diagnostiquez-vous un véritable trouble du sommeil ?
Lorsque la souffrance est devenue intolérable. Lorsque les gens organisent leur vie autour de leur insomnie. Quand aller au lit n'est plus un plaisir mais une angoisse.
 
En quoi le nouveau protocole sommeil mis en place par l'Ecole Thermale du stress de Saujon est intéressant ?
L'objectif de Saujon, depuis longtemps, est de proposer un sevrage complet des psychotropes inutiles, donc par définition les somnifères et les tranquillisants qui sont des produits toxiques. Les médicaments tuent. Les risques de décès de gens qui prennent plus de 3 mois des somnifères sont presque multipliés par 2.  Et ces personnes meurent d'infarctus, d'AVC... et développent Alzheimer.
 
Dès lors que les curistes suivent ce protocole en toute connaissance de cause, une bonne partie du travail est déjà accomplie. Reste la question, en dehors de la pharmacologie, du bon sommeil. Vont-ils mieux dormir ? Probablement oui. Pour une raison simple, se retrouver dans des lieux hors du temps, loin des soucis de la vie quotidienne, avec une équipe qui vous soigne est de bon augure.
 
Ensuite, il y a un travail pédagogique considérable à travers les différents ateliers. Les méfaits des somnifères, des tranquillisants y sont dénoncés et des méthodes validées internationalement sont suggérées. Personne aujourd'hui parmi les spécialistes du sommeil ne prescrit de somnifères, puisque ce n'est pas du sommeil mais de l'anesthésie légère. Somnifère est une escroquerie intellectuelle.
 
Étymologiquement, cela veut dire « apporter du sommeil », or c'est une perte de conscience, sans les bénéfices du sommeil. A partir du moment où 1/ les curistes retrouvent l'hygiène des rythmes (réveil à heure fixe,...), 2/ qu'ils sont dans un milieu hors du stress et que 3/ on leur apprend comment utiliser les plantes et la mélatonine, ils ne peuvent que mieux dormir.
 
La question que je me pose et qui m'intéresse le plus : une fois les curistes partis de Saujon, que va-t-il se passer au niveau du suivi ? A 1, 3 et 6 mois ? Ils vont retourner dans la « vraie vie », avec les soucis, et des rythmes différents. Et là, on verra si ça tient. Mais comme ils auront été largement informés, avec une véritable pédagogie, il y a des fortes chances que cela dure dans le temps. Peut-être pas à 100%, mais les curistes auront compris une chose : le sommeil, on s'en moque, on peut avoir de mauvaises nuits de temps en temps, ce qui compte c'est l'éveil. A partir du moment où la personne est en forme la journée, sans somnolence ni problème de concentration, c'est qu'elle a assez bien dormi.
 

Pourquoi est-il indispensable de comprendre les troubles du sommeil et balayer les idées reçues ?
D'abord je suis médecin, donc j'ai besoin d'avoir une démarche médicale. 1/ je cherche la cause. 2/ Je décris le phénomène et 3/ je le prends en charge. Parmi les causes, outre les origines toxiques (caféine, cola, thé, chocolat, boissons énergisantes), il y a quand même de nombreuses idées reçues comme la grasse matinée par exemple. Beaucoup de personnes, pourtant du matin, deviennent insomniaques en retraite ou pendant les vacances, parce qu'elles développent ce qu'on appelle un retard de phase en se levant tard.
 
Elles s'imaginent que, comme elles dorment mal, elles doivent dormir plus longtemps le matin et rentrent dans un cercle vicieux. Le jour où elles ont compris qu'elles sont du matin, et qu'elles doivent se lever à heure fixe précocement, et tous les jours, week-end compris, une immense partie de leur problème est résolue. Il y a en revanche des idées reçues qui sont correctes. Comme le sommeil utile avant minuit. Ce sont les trois premières heures de sommeil à l'horaire habituel. A Saujon, on va revenir sur toutes ces idées reçues, et leur donner des conseils utiles pour toute la famille d'ailleurs, pour les enfants et petits-enfants.

 
Selon vous, combien de temps faut-il pour rétablir un bon sommeil ? Faut-il un déclic comme pour un régime ?
En effet, il doit y avoir un déclic. Il suffit d'induire un cercle vertueux en supprimant les aberrations de comportement rythmiques et nutritionnels, et en supprimant ce qu'on appelle les toxiques du sommeil (produits excitants, lumière bleue des écrans, faire tourner en boucle ses soucis, etc.). Les équipes de Saujon donnent aux curistes beaucoup d'autres astuces. Lorsqu'ils auront réussi à supprimer les causes, une bonne partie du travail aura été fait. Avec quelques plantes et de la mélatonine, ils devraient dormir au bout de 4 à 5 semaines.
 

Parallèlement, avez-vous constaté les bienfaits de l'eau pour les troubles du sommeil ?
Oui bien sûr. Avec l'eau, on peut jouer sur l'hygiène des rythmes de température centrale en réchauffant le matin, en refroidissant le soir. Les massages sous l'eau, le sauna, le hammam, les jets puissants sont très bénéfiques et participent à la réussite de ce nouveau protocole.
 
*Le docteur Patrick Lemoine est psychiatre, docteur en neurosciences, ancien praticien hospitalier et directeur d'enseignement clinique à l'université Claude Bernard de Lyon. Spécialiste du sommeil, il a publié de nombreux ouvrages consacrés au sommeil et à ses troubles, à l'anxiété et au sevrage des médicaments. 

Article publié le 22/05/2017 à 01:00 | Lu 1730 fois