Dépendance : le calendrier et détails de la réforme

Le débat national a été officiellement engagé en janvier avec l’instauration du comité interministériel chargé de préparer le débat national sur la dépendance des personnes âgées et l’installation des quatre modérateurs des groupes de travail. Dans un premier temps, ces quatre groupes de travail réunissant experts et les principales parties prenantes concernées (élus nationaux et locaux, partenaires sociaux, associations, professionnels, médecins, usagers, etc.) vont réfléchir sur l’ensemble des problématiques liées au vieillissement de la population et à la prise en charge de la perte d’autonomie. Ces groupes vont travailler jusqu’au début de l’été. Détails.





Un site Internet sera par ailleurs mis en place à la fin du mois de janvier. Il permettra de recueillir les contributions citoyennes qui enrichiront le débat et de mettre à la disposition du grand public une documentation utile pour comprendre les enjeux liés à la dépendance.

A partir du mois d’avril, des débats interdépartementaux seront organisés dans chacune des 26 régions conjointement par les préfets de région et les directeurs généraux des agences régionales de santé (ARS). Après les réunions inter départementales, quatre colloques interrégionaux thématiques seront organisés.

Une restitution finale de l’ensemble des travaux sera remise au président de la République au début du mois de juillet. Elle servira de base au projet du gouvernement, dont les premières mesures figureront dans la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012, examinée à l’automne 2011.

Les quatre groupes de travail chargés de réfléchir sur la dépendance

1/ Groupe de travail « société et vieillissement » (animé par Annick Morel)
Au-delà de ses aspects financiers, la question de la perte d’autonomie soulève les questions de la place des personnes âgées dans notre société et des défis multiples liés au vieillissement. Le groupe de travail animé par Annick Morel, inspectrice générale des affaires sociales, s’interrogera ainsi sur les adaptations de notre monde aux réalités de la population de demain, que ce soit en termes d’aménagement du territoire ou d’adaptation de nos modèles sociaux. L’évolution des modèles familiaux aura également un impact majeur sur les modes de prise en charge des personnes âgées dépendantes. Les débats au sein de ce groupe de travail aborderont, par exemple, la place de la solidarité familiale, les liens intergénérationnels, ou l’aide aux aidants.

2/ Groupe de travail « enjeux démographiques et financiers de la dépendance » (animé par Jean-Michel Charpin)
L’objectif de ce groupe de travail animé par Jean-Michel Charpin, ex-commissaire au Plan et ex-directeur général de l’INSEE, sera d’établir des projections fiables et actualisées concernant la dépendance. Les travaux de ce groupe permettront d’établir des projections démographiques et une maquette financière qui servira de base à l’ensemble des réflexions et des débats concernant la dépendance. Pour cela, les membres du groupe devront établir des prévisions sur le nombre de personnes en situation de dépendance dans les prochaines années et de traduire ces évolutions en termes de dépenses publiques et privées. Ce groupe devra tenir compte également de l’impact potentiel de nouveaux traitements médicaux sur les situations de dépendance et à leurs conséquences prévisibles sur les besoins de financement futurs.

3/ Groupe de travail « accueil et accompagnement des personnes âgées » (animé par Evelyne Ratte)
Les débats au sein de ce groupe de travail pourront aborder la question de la place des technologies de l’autonomie, l’évolution des métiers au service de nos aînés, l’évolution de l’habitat et de l’urbanisme, l’offre de services, aussi bien à domicile qu’en établissement. Les réflexions de ce groupe de travail animé par Evelyne Ratte, conseillère maître à la Cour des comptes, ancienne préfète de la région Limousin, aboutiront à définir les conditions permettant de garantir le libre choix de nos concitoyens entre l’hébergement en établissement spécialisé et le maintien à domicile. La question des aidants familiaux, dont le nombre est appelé à diminuer au cours des prochaines années, devra être abordée.

4/ Groupe de travail « stratégie pour la couverture de la dépendance des personnes âgées » (animé par Bertrand Fragonard)
Le financement de la perte d’autonomie est partagé entre de nombreux acteurs : principalement l’Etat et la Sécurité sociale, mais également les conseils généraux, les assurances privées, les mutuelles, et les familles. En raison de la croissance programmée du nombre de personnes dépendantes, ces dépenses seront amenées à augmenter au cours des prochaines années. Ce groupe de travail, animé par Bertrand Fragonard, président du Haut conseil de la famille, analysera les questions du coût de l’hébergement pour les familles en fonction de leurs revenus et celle, plus structurelle, des pistes envisageables pour le financement de la perte d’autonomie. Les réflexions du groupe de travail aborderont également le sujet de la gouvernance associée au financement de la dépendance ainsi que les évolutions qui pourraient être proposées.
Dépendance : le calendrier et détails de la réforme

Dépendance : biographie des quatre modérateurs des groupes de travail

Jean-Michel Charpin, 61 ans, est diplômé l’Ecole Polytechnique et de l’ENSAE (Ecole nationale de la statistique et de l’administration économique). Il début sa carrière à l’INSEE en 1973 en tant que responsable des travaux techniques de projection à moyen terme. Il est nommé en 1984 directeur de cabinet de Jean Le Garrec, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé du Plan. De 1985 à 1990, il dirige le Centre d'études prospectives et d'informations internationales auprès du Commissariat général du Plan. En 1990, il rejoint le secteur financier, où il devient Directeur de la gestion actif-passif de la BNP. Il retourne à l’INSEE en 2003, institution qu’il dirige jusqu’en 2007. Il est l’auteur de plusieurs rapports, notamment L’Économie française en perspective pour le Commissariat au Plan et L’avenir de nos retraites pour le Premier ministre.

Bertrand Fragonard, 70 ans, ancien élève de l’ENA, commence sa carrière à la Cour des comptes. Il a travaillé auprès du secrétaire d'État à l'Action sociale de 1974 à 1977. En 1978, il est nommé directeur adjoint du cabinet de Simone Veil, ministre de la santé. Il devient ensuite directeur de la CNAF. Il est commissaire au Plan de 1987 à 1988, puis délégué interministériel au RMI de 1997 à 1998. Il est actuellement conseiller maître à la Cour des comptes et président du Haut conseil à la Famille.

Annick Morel, 60 ans, ancienne élève de l’ENA, a commencé sa carrière en 1973 en tant que professeur de sciences économiques et sociales. Administratrice civile, elle travaille au ministère de la Solidarité à partir de 1982, puis à la Cour des Comptes entre 1986 et 1988. Directrice du cabinet, en mai 1988, du secrétaire d’Etat chargé des personnes âgées et des personnes handicapées, elle est ensuite nommée en août 1988 conseillère technique de Claude Evin, ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale. Depuis 1998, elle est inspectrice générale des affaires sociales.

Évelyne Ratte, 59 ans, est agrégée d’histoire et ancienne élève de l'ENA. Elle devient directrice de cabinet d'Hervé de Charette, d’abord ministre délégué à la Fonction publique (1986-1988), puis ministre du Logement (1993-1995). Conseillère référendaire à la cour des comptes de 1995 à 2003, elle est promue conseillère maître en 2003. En 2005, elle est nommée Préfète de l’Aisne, puis du Limousin de 2007 à 2010.

Les chiffres clés de la dépendance

Personnes concernées

La population âgée en France représente aujourd’hui 14,1 millions de personnes de plus de 60 ans et 1,5 million de plus de 85 ans.

Ce nombre va fortement augmenter, à la fois sous l’effet du vieillissement de la population et de l’arrivée aux grands âges des générations issues du baby boom. Ainsi, les personnes âgées de plus de 85 ans seront 2 millions en 2015. En 2010, on peut dénombrer 1,16 million de bénéficiaires de l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA). 61 % des bénéficiaires vivent à domicile.

Les principales aides versées

a- L’allocation personnalisée d’autonomie
L’allocation personnalisée d’autonomie (APA) représente un montant global de 5,2 milliards d’euros en 2010. Elle est attribuée, versée et financée par les conseils généraux.

b- Les aides à l’hébergement en établissement
Le coût de l’hébergement en établissement est à la charge de l’usager. Il représente l’essentiel du reste à charge pour ce mode de résidence, les soins étant payés par l’assurance maladie, et les prestations autres liées à la perte d’autonomie étant en grande partie prises en charge par l’APA. Néanmoins, l’usager peut bénéficier d’un certain nombre d’aides lui permettant d’acquitter le tarif hébergement :
­ prise en charge possible par l’aide sociale à l’hébergement (ASH). L’ASH a été versée à un résident en établissement sur cinq, pour un montant de 1,1 milliard d’euros en 2009 ;
­ versement d’aides personnelles au logement (APL) pour un montant estimé à 568 millions d’euros en 2009.

c- L’aide sociale des caisses et des conseils généraux
Pour les personnes moins dépendantes (classées en GIR 5 et 6), l’aide n’est pas versée par le conseil général mais par la CNAV (Caisse nationale d’Assurance Vieillesse). En 2009, son budget total d’intervention a été de 394 millions d’euros dont 330 millions d’euros de prestations individuelles (aide ménagère à domicile, aide au retour à domicile après hospitalisation, aide à l’amélioration de l’habitat…). L’aide sociale départementale permet également de financer, en plus de l’APA, des heures d’aide ménagère ou des prestations de services de repas à domicile. En 2008, ce sont 82 millions d’euros qui ont été consacrés à ces aides.

d- Les mesures fiscales et sociales
En 2009, les exonérations fiscales et sociales centrées sur la dépendance des personnes âgées ont représenté un montant total de 2,1 milliards d’euros. En particulier, des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale bénéficient aux particuliers dépendants et aux accueillants familiaux de personnes dépendantes employant des aides à domicile (861 millions d’euros), ainsi qu’aux associations ou entreprises proposant des services d’aide à domicile pour les personnes dépendantes (640 millions d’euros). Des aides permettent enfin d’alléger la facture pour les usagers résidant en établissement, soit directement à travers une réduction d’impôt sur le revenu (155 millions d’euros), soit indirectement grâce à un taux de TVA à 5,5 % pour la fourniture de logement et de nourriture (345 millions d’euros).

Les capacités d’accueil

De grands plans de développement du nombre de structures d’accueil ont été lancés ces dernières années, rappelle le ministère. En particulier, le Plan solidarité-grand âge 2008-2012 a fixé des objectifs ambitieux de création de places en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et en services de soins infirmiers à domicile (SSIAD). « Son objectif initial était la création de 25 000 places en établissement, seuil qui sera dépassé, ainsi que 232 000 places de SSIAD » affirme le communiqué.

Dans le secteur des personnes âgées dépendantes, plus de 10 000 établissements et services sont ainsi recensés, qui représentent plus de 675 000 places, dont les deux tiers en EHPAD. Les structures sont pour moitié à statut public (établissement public local). Parmi les structures de statut privé, une part prépondérante est à but non lucratif (associations). « Les différents plans mis en œuvre ont ainsi permis de ramener le taux d’équipement en France dans la moyenne européenne » conclut le communiqué du ministère.

Article publié le 10/01/2011 à 10:57 | Lu 3798 fois