Contes carnivores de Bernard Quiriny : simili con carne





Imaginez un peuple, enfin je dis « imaginez », ce peuple existe bien, au moins dans la fiction de Bernard Quiriny, imaginez donc les Yapous vivant au sein de l’Amazonie. Ce peuple est une énigme pour les ethnologues et les linguistes.

Figurez-vous que leur langue est tout bonnement impossible à comprendre, y compris pour les Yapous eux-mêmes. « Les Yapous utilisent n’importe quel mot pour n’importe quel autre : la signification de leurs propos parait plus où moins indépendante des vocables qu’ils emploient (…) ».

Leurs propos se font d’une voix monocorde sans aucune intonation et ils ignorent les formes interrogatives ou exclamatives. Pour se nommer ils n’emploient ni noms propres, ni prénoms mais des pronoms limités à neuf qu’ils utilisent de toute façon indifféremment.
Contes carnivores de Bernard Quiriny : simili con carne

Le quiproquo et le malentendu est la base de leur société. « Leur système », précise le jeune universitaire qui narre cette étude, leur laisse « préserver les rares espaces de liberté où l’on retrouve un peu du sens de l’absurde ».

Le sens de l’absurde est d’ailleurs le moteur de ces quatorze contes auxquels il faut ajouter la préface d’Enrique Vila-Matas. L’humour noir et le cynisme en sont le carburant.

On y croise des critiques de marées noires, une femme qui pond des œufs, un tueur à gages qui doit abattre son commanditaire, un écrivain Nicolas Sambin, le nègre d’Henri Quesnel, « évidemment ce serait plus intéressant si Quesnel était connu », un évêque qui à deux corps, etc.

Ces « contes carnivores » croquent la réalité. Le vrai est l’égal du faux comme si le réel n’était pas plus plausible que l’imagination.

Contes carnivores
Bernard Quiriny
Editions du Seuil
245 pages
18 euros

Article publié le 22/09/2008 à 08:43 | Lu 4520 fois