Conducteurs seniors : 3 questions à Sylvie Bonin-Guillaume, professeur de gériatrie

Dans le cadre d’un grand dossier mis au point par la Société française de Gériatrie et de Gérontologie, la professeur de gériatrie à l’APHM, Sylvie Bonin-Guillaume revient en trois questions sur l’épineuse question des personnes âgées au volant.





Le vieillissement est-il dangereux pour la conduite ?
Il est important de distinguer les difficultés liées au vieillissement qui nécessitent dans la plupart des cas une simple modification des comportements (ne pas conduire la nuit par exemple) et celles liées à une pathologie, qui peuvent toucher des personnes de tous âges et qui peuvent nécessiter un arrêt total de la conduite.
 
Le vieillissement n’entraine pas d’incapacité en soi. Il requiert souvent des adaptations dont il est important de parler. Mais il ne s’agit pas de dire aux seniors ce qu’ils ne peuvent plus faire mais bien ce qu’ils peuvent toujours faire ! 
 
De plus, les enquêtes auprès des seniors ont montré qu’ils sont parfois très attachés à la voiture. En effet, pour beaucoup d’entre eux, la voiture permet d’être autonome, de rendre visite à des amis, de faire ses courses, etc.
 
Comment se rendre compte qu’un proche à besoin de modifier sa conduite ?
Lorsqu’un membre de l’entourage se trouve dans la voiture, il peut se rendre compte que la personne qui conduit rencontre des difficultés en situation de conduite.
 
Cela peut être une difficulté à retrouver son chemin, une attitude de stress face à la conduite, ou bien des ralentissements fréquents qui questionnent le confort de conduite de la personne.
 
Dans ces situations, il est important de poser les bonnes questions au conducteur pour aborder le sujet sereinement.
 
Comment aborder le sujet ?
Il n’y a pas de recette magique. Brandir le spectre de l’interdiction auprès des séniors est contre-productif. D’une part parce que c’est rarement nécessaire : les personnes âgées qui ne peuvent plus conduire s’arrêtent toutes seules la plupart du temps.
 
D’autre part, parce que la stigmatisation de cette population provoque l’effet inverse : le senior va tenter à tout prix de prouver qu’il est toujours en capacité de conduire. Par contre, poser la question en terme de confort permet une prise de conscience de ce qui est raisonnable et de ce qui ne l’est pas.
 
Par exemple : « te sentirais-tu à l’aise à l’idée de faire un Paris-Marseille ? De te retrouver au milieu d’un carrefour compliqué ? Ou bien de faire des trajets de nuit ? »
 
Les réponses à ces questions permettront de cibler ce que la personne devrait éviter et les trajets qui au contraire peuvent être encouragés : les trajets courts, de jour etc. Il faut inciter ses proches non pas à arrêter de conduire mais à conduire différemment.

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Article publié le 03/09/2019 à 01:00 | Lu 12598 fois