Cancer du sein : quand des vaisseaux sanguins combattent les tumeurs

Pour la première fois, des vaisseaux sanguins très spécifiques ont été découverts dans des tumeurs cancéreuses. Selon une étude menée récemment par une équipe de l’Inserm* en collaboration avec l’Institut Claudius Regaud, « ces vaisseaux faciliteraient l'accès vers les cellules cancéreuses de certains globules blancs -les lymphocytes tueurs- et entraîneraient ainsi une destruction efficace des tumeurs »… Explications.





Une catégorie de globules blancs, les « lymphocytes tueurs », sont chargés de reconnaître et de détruire les cellules cancéreuses dans l'organisme.

Cependant, l'éradication de la maladie requiert la présence d'un grand nombre de cellules tueuses au contact des tumeurs. Comment ces lymphocytes parviennent-ils à pénétrer dans les tumeurs pour les détruire ?

Si ce mécanisme demeurait mystérieux jusqu'à présent, l'équipe de Jean-Philippe Girard à l'Institut de pharmacologie et de biologie structurale, en collaboration avec des chercheurs de l'Institut Claudius Regaud, lève le voile sur l'infiltration des lymphocytes dans les tumeurs.

En menant une étude clinique sur près de 150 patientes souffrant d'un cancer du sein, les scientifiques ont ainsi découvert la présence d'un type particulier de vaisseaux sanguins, appelés HEV, dans les tumeurs. En temps normal, ces vaisseaux HEV sont présents dans les ganglions lymphatiques où ils constituent la porte d'entrée pour les lymphocytes arrivant par le sang. Les cellules qui tapissent la paroi de ces vaisseaux HEV sont bombées, arrondies, et cette morphologie très caractéristique facilite le passage des lymphocytes du sang vers le tissu.

L'équipe toulousaine a constaté que la présence d'un grand nombre de lymphocytes tueurs dans les tumeurs du sein était liée à la présence d'un grand nombre de vaisseaux HEV dans ces tumeurs. Cela suggère que, comme dans les ganglions, les HEV constituent la porte d'entrée des lymphocytes dans les tumeurs. De plus, les chercheurs ont observé qu'avec beaucoup de vaisseaux HEV dans une tumeur, la probabilité de guérison des patientes était augmentée. La présence de ces vaisseaux HEV dans une tumeur serait donc un facteur de bon pronostic.

Prochaines étapes pour les chercheurs : confirmer ces résultats sur de plus grands groupes d e patientes et étudier l'influence des vaisseaux HEV sur la réponse aux thérapeutiques (chimio et radiothérapies) couramment utilisées dans le traitement du cancer du sein.

Des travaux sont également en cours pour examiner le rôle des vaisseaux HEV dans les mélanomes, les cancers des ovaires et du colon. A plus long terme, l'objectif vise à augmenter la quantité de vaisseaux HEV dans les tumeurs et/ou les faire apparaître dans les tumeurs qui n'en n'ont pas, afin de permettre un recrutement massif de lymphocytes tueurs pour éradiquer les cellules cancéreuses.

Ces travaux font l'objet d'une publication dans Cancer Research (Août 2011).

*Etude menée par l'équipe de Jean-Philippe Girard, directeur de recherche Inserm à l'Institut de pharmacologie et de biologie structurale (CNRS/Université Toulouse III - Paul Sabatier), en collaboration avec l'Institut Claudius Regaud.

Article publié le 17/08/2011 à 11:23 | Lu 1949 fois