Cancer de la prostate : la prolactine, interrupteur de la tumeur ?

Une équipe internationale de chercheurs associant l’Inserm et l’Université Paris Descartes a publié dans la revue scientifique de l'Académie des Sciences américaine (PNAS) une étude montrant que la prolactine, une hormone produite au sein de la prostate, stimule la multiplication désordonnée de certaines cellules et favorise ainsi le développement de la tumeur. Une nouvelle cible pour les cancers résistant aux traitements conventionnels ?


« La plupart des cancers de la prostate, seconde cause de mortalité par cancer chez l’homme, sont traités avec succès par ablation totale ou partielle de la prostate ou par radiothérapie » indique le communiqué de l’Inserm. Et d’ajouter : « pour les formes avancées, les traitements dirigés contre les hormones mâles ou la chimiothérapie ne parviennent souvent qu’à retarder la progression de la maladie et la formation ultime de métastases osseuses. La recherche s’attache donc à développer des thérapies alternatives capables d’empêcher le développement de la tumeur ».

Des travaux récents ont démontré que le cancer de la prostate prenait naissance dans une population cellulaire spécifique : les cellules « basales ». Il s'agit de cellules primitives qui vont ultérieurement donner naissance aux cellules sécrétant le fameux marqueur PSA (Prostate Specific Antigen). Le taux sanguin de ce marqueur est aujourd’hui l’un des outils de dépistage du cancer de la prostate.

On sait par ailleurs que la prolactine, une hormone produite par une petite glande à la base du cerveau (hypophyse) et connue essentiellement pour ses effets sur la lactation, est aussi produite par la prostate. Elle favorise la croissance des cellules prostatiques, et est retrouvée en plus grande quantité au niveau local dans les cancers avancés. Les chercheurs ont donc supposé que la prolactine produite au sein de la prostate pouvait être un facteur local favorisant le développement de la tumeur.

A l’aide de souris modifiées génétiquement pour mimer la pathologie humaine, Vincent Goffin et son équipe viennent en effet de montrer qu’une production excessive de prolactine par la prostate induisait des tumeurs dont la caractéristique principale était l'accumulation totalement anarchique de cellules basales.

Dans son communiqué, l’Inserm souligne que « l’hormone prolactine pourrait donc jouer un rôle dans les étapes très précoces du processus tumoral. Inversement, on parvient chez l’animal à prévenir la formation de tumeurs grâce à une molécule qui empêche la prolactine d’exercer ses effets ».

« Nous avons montré que la prolactine était peut-être une sorte d’interrupteur que l’on pouvait éteindre pour empêcher une tumeur de se développer » précise Vincent Goffin de l’Unité Inserm 845 à la Faculté de Médecine Necker à Paris. Reste à développer une version thérapeutique de cette molécule, capable de jouer ce rôle d’interrupteur à long terme. « Vincent Goffin et son équipe travaillent actuellement au développement d’une molécule de synthèse prometteuse » conclut le communiqué.

En 2005, le cancer de la prostate était le cancer le plus fréquent en France, avec 62 245 nouveaux cas diagnostiqués dans l’année. Il est le quatrième en termes de mortalité, avec 9 202 décès estimés.

Publié le 17/09/2010 à 11:09 | Lu 4229 fois