Cancer colorectal : les soupçons sur l’influence de la charcuterie se confirment selon l’INRA

Depuis longtemps soupçonnée de favoriser les cancers du côlon, la consommation de charcuteries fait l'objet de recommandations précises de la part des organismes de prévention du cancer. Pourtant ces recommandations ne reposaient jusqu’à maintenant que sur des corrélations observées au cours d'études épidémiologiques. A l'INRA de Toulouse, une équipe de chercheurs vient de montrer, pour la première fois dans un modèle animal, que la consommation de charcuteries était directement responsable d'une augmentation des lésions pré-tumorales au niveau du côlon.





La consommation de viande rouge et de charcuteries est incriminée depuis plusieurs années dans la survenue de cancers du côlon, première cause de mort par cancer chez les non-fumeurs en France : chaque jour, 100 nouvelles personnes sont atteintes, et 45 en meurent.

En 2007, le World cancer Research Fund (WCRF) a conclu que la consommation de charcuteries était liée au cancer du côlon, avec un facteur de certitude très élevé, en se basant sur des corrélations observées lors d'études épidémiologiques. Sur cette base, le WCRF a recommandé d'éviter de consommer des charcuteries.

A l'INRA de Toulouse, une équipe de chercheurs, associée à l'Institut du Porc (IFIP), a cherché à comprendre comment les charcuteries pouvaient être promotrices du cancer du côlon. Plus précisément, les chercheurs ont quantifié l'importance de différents facteurs du procédé de fabrication des charcuteries sur la carcinogenèse colorectale.

Un récent communiqué publié par l’Institut national de recherche agronomique (INRA) indique que pour la première fois, in vivo chez le rat, une charcuterie modèle riche en hème*, salée, additionnée de nitrites, cuite et oxydée était promotrice de la carcinogenèse colorectale.

Pour arriver à ce résultat, les chercheurs ont testé quatre facteurs représentatifs de la transformation industrielle des charcuteries : la couleur, l'ajout de nitrites, la cuisson et l'oxydation du produit. Après avoir essayé seize combinaisons différentes, ils ont trouvé que l'association de ces quatre facteurs qui mime le procédé de fabrication d'un jambon cuit, puis exposé à l'air, était celle qui générait le plus de lésions précancéreuses au niveau de la muqueuse intestinale.

Selon le communiqué de l’INRA, « le pouvoir promoteur des charcuteries vient probablement de la transformation de l'hème lors du processus de fabrication. En effet celui-ci va subir une réaction chimique qui va le modifier, - la nitrosylation-, lui permettant à son tour de catalyser la formation des agents véritablement cancérigènes : des peroxydes et des composés N-Nitrosés ».

Outre la validation expérimentale des observations de l'épidémiologie, ce travail ouvre la voie à des stratégies de prévention qui consisteraient à modifier le procédé de fabrication des charcuteries (par exemple, contrôler le statut d'oxydation en produisant et conservant les charcuteries dans des milieux dépourvus d'oxygène ou en ajoutant des antioxydants comme la vitamine E) conclut l’INRA.

* la molécule qui donne sa couleur rouge à la viande, et qui lui donne son aspect rosé lorsque cette dernière est cuite. Plus elle est abondante, plus le muscle est rouge. Cette molécule apporte le fer, sous sa forme la plus facilement assimilable pour l'homme.

Article publié le 12/07/2010 à 09:27 | Lu 2657 fois