Antioxydants et santé : bénéfices et risques dans le cas des maladies cardiovasculaires

Dans le cadre de la 49ème Journée annuelle de la nutrition et de diététique (JAND), qui s’est tenue le 30 janvier 2009 au Cnit de Paris-la-Défense, le docteur Dallongeville* de l’Inserm s’est penché sur le rôle des antioxydants sur la santé, et plus spécifiquement, sur les bénéfices et les risques qu’ils pouvaient avoir sur les maladies cardiovasculaires. Explications.


Antioxydants et santé : bénéfices et risques, l’exemple des maladies cardiovasculaires
Le rôle important joué par l’alimentation et les habitudes de vie dans le développement des maladies cardiovasculaires est, aujourd'hui, bien établi.

De nombreuses études ont été lancées, qui tentent plus précisément d'évaluer l'impact chez l'homme des vitamines antioxydantes, dont les effets cardioprotecteurs ont été démontrés expérimentalement.

L'objectif, aujourd'hui, est de mieux comprendre la nature de la relation entre les fruits et légumes et les maladies cardiovasculaires, et d'estimer le rôle des vitamines antioxydantes dans la prévention de ces maladies.

Relation entre fruits et légumes et accidents cardiovasculaires
Une analyse des données d’études épidémiologiques a été menée afin de mesurer la relation entre la consommation de fruits et légumes et la survenue d’accidents vasculaires cérébraux et cardiaques(1).

Les résultats montrent une baisse de 11% du risque d’accident vasculaire cérébral par portion additionnelle quotidienne de fruits ou de légumes, et une diminution de 3% du risque d’évènement coronaire (infarctus du myocarde, etc.). Ces résultats suggèrent que les composants des fruits et légumes contribuent à la prévention des accidents vasculaires.

Cependant, les études incluses dans ce travail présentent des limites méthodologiques qui ne permettent pas d’établir formellement un lien de causalité entre consommation de vitamines antioxydantes et prévention des maladies cardiovasculaires. Des études complémentaires sont donc nécessaires, notamment biologiques et cliniques, pour établir définitivement un effet protecteur.

Vitamines et régulation des mécanismes d’oxydation
De nombreuses études expérimentales ont mis en évidence les effets des vitamines dans la régulation, notamment, des mécanismes d’oxydation, ainsi que dans les processus de thrombose et d’accumulation lipidique vasculaire.

Or, on sait que l’oxydation des lipoprotéines de type LDL (« mauvais » cholestérol) favoriserait la formation et le développement de la plaque d’athérome. D'après les observations, l’absorption de vitamines antioxydantes issues des fruits et légumes pourrait donc inhiber l’oxydation des LDL et, par conséquent, le développement de la plaque d’athérome.

Ces études ne peuvent, néanmoins, pas rendre compte de la complexité des mécanismes mis en jeu dans le développement de l’athérosclérose. La mise en évidence des mécanismes protecteurs des fruits et légumes passe, nécessairement, par la démonstration, chez l’homme, des effets des vitamines des fruits et légumes sur la survenue d’accidents cardiovasculaires.

Effets d’une supplémentation en vitamine E

● Principales sources alimentaires de vitamine E
Les huiles végétales et les légumes constituent les principales sources de vitamine E de l’alimentation en Europe et en Amérique du Nord. Les apports alimentaires moyens, dans la population, sont de l’ordre de 10 à 15 mg/jour, correspondant aux apports conseillés.

● Rôle de la vitamine E au niveau cellulaire
La vitamine E est un antioxydant liposoluble puissant. Cette propriété lui confère un rôle important dans la prévention de la peroxydation des lipides des membranes cellulaires et des LDL. L’α-tocophérol (variété chimique de la vitamine E la plus abondante et la plus active dans le sang) inhibe également l’activité de la protéine kinase C et la prolifération cellulaire, réduit l’angiogenèse tumorale, module l’expression de certains gènes et augmente la réponse immunitaire. L’ensemble de ces propriétés contribue, in vitro, à la prévention de l’athérosclérose.

● Vitamine E alimentaire et survenue d'évènements coronaires
La relation entre la consommation de vitamine E et les maladies cardiovasculaires est rapportée dans les études épidémiologiques. Une analyse de données épidémiologiques(2) a ainsi montré une relation inverse entre la consommation de vitamine E alimentaire et la survenue d’évènements coronaires, avec une diminution du risque coronaire. Certaines études n'ont, en revanche, pas trouvé de relation entre les taux de vitamine E dans le sang et la maladie coronaire.

● Supplémentation vitaminique et mortalité cardiovasculaire
Plusieurs essais thérapeutiques ont évalué les effets de la supplémentation en vitamine E sur la mortalité, cardiovasculaire et totale. Dans une analyse des données des essais(3), la supplémentation vitaminique était directement associée à la mortalité totale.

L’augmentation était linéaire et continue à partir de 150 UI/jour de vitamine E. Ces résultats ont été confirmés au cours d'une analyse des données récentes, avec une augmentation moyenne de 4% du risque de décès chez les sujets qui reçoivent des suppléments de vitamine E.

La supplémentation n’étant pas associée à une diminution des évènements et de la mortalité cardiovasculaires, l’hypothèse d’un rôle protecteur de la vitamine E des légumes sur les maladies cardiovasculaires ne peut être vérifiée.

(1) Mesure effectuée par Dauchet et collaborateurs à partir d'enquêtes épidémiologiques prospectives. Seules les études qui présentaient des données quantitatives de consommation étaient incluses dans ce travail d'analyse.
(2) Analyse de 9 études prospectives regroupant 293 172 sujets, suivis en moyenne pendant 10 ans.
(3) Analyse portant sur 19 essais incluant plus de 130 000 sujets, suivis pendant 1,8 à 8,2 ans, et recevant entre 16,5 à 2000 UI/jour de vitamine E.


*Intervention du Docteur Dallongeville
Epidémiologie et Santé Publique
Institut Pasteur de Lille, INSERM 744, Lille

Publié le 17/02/2009 à 10:50 | Lu 7506 fois