Accompagnement des plus âgés et innovation, chronique de Serge Guérin

En juin dernier, j'ai participé au Centre mix'âges d'échange et de partage intergénérationnel situé dans un quartier hlm de Paris, à un Atelier de sensibilisation aux discriminations. Cet atelier, mis en place par un organisme de formation (Fide) était dédié aux discriminations envers les seniors. Fide est une structure qui favorise la préparation aux métiers du care et de l'accompagnement des personnes. Plus original, Fide intervient aussi sur l'aide au retour à l'emploi des chômeurs âgés.





J'ai souhaité montrer une fois de plus combien le regard négatif posé sur les seniors portait sur un jugement de valeur beaucoup plus large. Il s'agit à la fois de produire une distinction entre ceux qui sont associés à des valeurs positives (mobilité, capacité d'adaptation, rapidité...), c'est-à-dire, les « jeunes », et ceux qui sont réputés être dépassés, incompétents, fatigués... Soit les seniors, on l'aura compris.

Derrière ces représentations, c'est bien un type de société qui est soutenue. Les seniors, les vieux, les personnes âgées apparaissent comme un poids dans une société qui se veut fondée sur la performance et la réussite individuelle.

Il en serait autrement, si l'axe sociétal était décentré vers l'importance de l'expérience, la nécessité d'inclure l'ensemble des publics, la primauté donnée à l'homme sur la structure… Alors, la question de l'âge ne serait pas traitée de la même façon.

Au cours de cette journée, d'autres sujets ont été abordés. Par exemple, la situation des immigrés âgés, en particulier en provenance du Maghreb : ils sont plus de 900.000 aujourd'hui. Hedi Chanchabi* est revenu sur l'expérience des cafés sociaux accueillant ces publics, comme le fait Ayyem Zamen, à Paris. Il est toujours intéressant de voir combien des initiatives anciennes (ici les bistrots) retrouvent une seconde modernité et une perspective plus solidaire. Ces lieux ne sont pas seulement des espaces de convivialité, ils permettent aussi aux bénévoles de conseiller les personnes, de les accompagner pour différentes démarches.

Une autre exemple a été présenté par Catherine Launay, qui dirige Entraide, une association d'aide à domicile, qui porte sur le repérage et la lutte contre la maltraitance des personnes âgées. Il est intéressant de noter que cette maltraitance est regardée tant du point de vue des personnels que des personnes âgées. Une fois de plus, il est mis en avant la nécessité de former et d'accompagner les personnels. Il s'agit d'abord de les écouter, mais aussi de mettre en place un cadre, des règles et des sanctions concernant la maltraitance.

Les métiers de l'attention à l'autre sont ceux qui participent de façon essentiel à la société, au bien vivre ensemble. Il existe bel et bien un lien direct entre les risques de maltraitance et le regard porté sur les plus âgés : une société qui méprise et dévalorise les vieux, les faibles et les fragiles est une société qui érige la maltraitance en règle commune.

Serge Guérin
Professeur à l’ESG
Vient de publier, De l’Etat Providence à l’état accompagnant Editions Michalon

*Auteur d’Histoire, mémoires, cultures de l'immigration : 30 ans d’apports des associations

Article publié le 12/07/2010 à 09:12 | Lu 2123 fois