Accessibilité : pour Paris, un choix nécessaire, voire totalement indispensable…

L’association Accès Universel a récemment organisé à la Maison de Victor Hugo à Paris, une rencontre avec des professionnels venus s'exprimer lors d'une conférence-débat intitulée « Rendre Paris accessible : défis et actions ». Représentants associatifs, collectivités locales, entreprises, usagers, organismes de formation, bailleurs sociaux, sociétés de conseil et universités ont ainsi pu débattre des problématiques d'accès à la voirie, à l'architecture et à la culture dans la ville lumière. Parce que l’accessibilité nous concerne toutes et tous.





Paris, avec ses 1.700 kilomètres de réseau viaire et ses 2.000 bâtiments municipaux, représente un défi de taille à relever pour permettre une accessibilité optimale aux deux millions de résidents parisiens, aux employés qui viennent chaque jour à Paris et aux vingt-sept millions de touristes qui affluent chaque année dans la capitale.

L'accessibilité, c'est d'abord une liberté de choix qui permet un élargissement du champ des possibles. Or, garantir un choix le plus large possible et le plus proche de son domicile représente encore un luxe pour les 10% de Parisiens en situation de handicap.

Ce travail nécessite une coordination territoriale accrue, comme l'expliqueVéronique Dubarry, adjointe au Maire de Paris en charge des Personnes en situation de handicap : « tous les acteurs de la ville sont concernés, que ce soit les services internes de la mairie, les associations, l'État, la Préfecture de Police ou les autres intervenants sur l'espace public comme la RATP. »

Une coordination nécessaire que l'on retrouve dans la mise en place du Plan de mise en accessibilité de la voirie parisienne (PAVE), élément de cadrage crée lors de la loi de 2005 pour l'égalité des droits et des chances.

« On effectue d'abord un relevé des non-conformités sur le terrain qui donne lieu à la création d'un référentiel technique pour les équipes municipales et à la mise en place d'un plan d'actions qui se décline en 176 propositions concrètes de court, moyen ou long terme », explique de son côté Didier Couval, responsable du Pôle accessibilité de l'Agence de la Mobilité à la Direction de la Voirie et des Déplacements de la Ville de Paris. « Le PAVE n'est pas soumis à la date butoir de 2015 mais le plan d'actions sera mis en place d'ici l'été 2012 ».

Parmi les points phares du plan : le redéploiement des places de stationnement réservé et le guidage tactile et visuel dans les traversées piétonnes. « Contrairement au Japon ou à la Corée, la France se heurte à la lourdeur du contexte réglementaire. L'enjeu est de trouver des solutions qui seront retenues sur le plan national » conclut Didier Couval.

De nouvelles actions doivent être discutées au Conseil de Paris, parmi lesquelles la détection visuelle du mobilier urbain et la mise aux normes dimensionnelles des places de stationnement. Parmi les autres initiatives développées par la Ville de Paris figure la mise en place du Centre de ressources d'accessibilité pour tous (CRAPT). Dans ce cadre, les 830 bureaux de vote parisiens sont considérés accessibles, grâce à l'installation de rampes provisoires pour les personnes en fauteuil lors de chaque élection.

Des efforts de pérennisation de cette mise en accessibilité ont été faits pour permettre l’accessibilité des écoles recueillant les bureaux de vote et supprimer des rampes peu pratiques et parfois non-conformes, mais beaucoup de chemin reste encore à parcourir pour atteindre la mise en accessibilité totale, comme l'explique Hélène Desbieys, Adjointe au chef de la Section de la Réglementation et du Développement à la Direction du Patrimoine et de l'Architecture de la Ville de Paris : « Le dialogue initié en 2005 a permis d'aboutir à un consensus mais les actions n'ont pu réellement débuter que l'an dernier, malgré un budget défini et prêt à l'emploi. Aujourd'hui, il est nécessaire de partager une vision commune de l'accessibilité. Cela passe par un travail quotidien de sensibilisation et de formation des agents ».

Le schéma directeur d'accessibilité des bâtiments mis en place en 2004 et mis à jour en 2010 par la ville est un des outils utilisés pour sensibiliser les services opérationnels à la nécessité de garantir une continuité dans la chaîne des déplacements. Il contient un référentiel intitulé « Autonomade » qui a pour but d'améliorer le repérage et l'orientation pour tous à l'intérieur des bâtiments. Ainsi, un prototype de pupitre multisensoriel a été mis au point en 2011 à la mairie du 11e arrondissement. Six mairies d'arrondissement devrait l'adopter d'ici la fin de l'année.

Dans le champ culturel, plusieurs initiatives ont été mises au point afin de rendre les collections permanentes et les expositions de la Maison de Victor Hugo accessibles au plus large public. La Maison de Victor Hugo, qui accueille plus de 60% de visiteurs étrangers, fait figure de modèle dans le domaine puisqu'elle peut s'enorgueillir de deux labels Tourisme et Handicap. La mise en place d'un ascenseur et de vitrines à hauteur d'hommes, la suppression des marches à l'entrée de l'accueil, la mise à disposition de deux places de stationnement réservées leur a valu l'obtention du label pour le handicap moteur en 2007. Une première étape qui a mené à l'obtention du label auditif en 2010.

Depuis l'organisation d'un projet d'établissement participatif impliquant tout le personnel, le musée met en oeuvre tous les moyens humains (formation, mobilisation, intégration), matériels et technologiques pour une accessibilité globale : formation LSF des agents du musée, recrutement d'un agent sourd à l'accueil, mise en place d'audioguides, de visioguides, d'audiophones, de boucles magnétiques et d'un système de sous -titrage, sans oublier les mesures de sécurité nécessaires en cas d'évacuation.

Le handicap visuel n'en est pas en reste avec la distribution de documents en braille ou en gros caractères et de documents thermo-reliés. Le musée dispose aussi de télés-agrandisseurs à la bibliothèque et au département des manuscrits. Des visites tactiles sont également organisées. « Le musée se positionne désormais pour obtenir le label du handicap mental », indique Gérard Audinet, directeur de la Maison de Victor Hugo. Et Thierry Renaudin, Secrétaire général de la Maison de Victor Hugo, de préciser : « Nous avons travaillé en concertation avec les institutions et les associations afin d'établir une méthodologie qui puisse être reprise par l'ensemble des institutions culturelles et touristiques ». Un document d'aide à la visite adapté a également été crée pour faciliter l'accès au musée de tous les publics à tous les âges de la vie.

Tout comme le rappelle Véronique Dubarry, l'accessibilité doit être universelle. Il ne s'agit pas de privilégier une typologie de handicap, mais de prendre en compte les besoins de l'ensemble des personnes vulnérables, ce qui bénéficie en définitive à tous les usagers, y compris les étrangers et les enfants. Un combat quotidien avec les décideurs qui mérite largement d'être mené.

Rappelons qu’Accès Universel est une association créée en janvier 2006 ; elle a pour mission de promouvoir l'accessibilité dans tous les domaines de la vie en société : architecture, transports, santé, éducation, emploi, nouvelles technologies, culture et sports. Elle organise les 20 et 21 novembre 2012 le premier Congrès mondial de l'accessibilité universelle au siège de l'UNESCO à Paris.

Article publié le 24/02/2012 à 10:00 | Lu 2331 fois