Vitaminer l’emploi des seniors, chronique par Serge Guérin

La crise financière qui se déroule sous nos yeux rend encore plus caduc les discours idéologiques en faveur de la retraite par répartition. Pensons d’ailleurs à ces millions d’Américains qui voient leur épargne retraite se réduire comme peau de chagrin à mesure que les actions baissent et les institutions financières s’écroulent. Les Fonds de pension ne sont plus à la fête. Voilà qui renforce encore l’impératif en faveur d’une politique active et imaginative en faveur de l’emploi des seniors. Au delà des discours et des incantations moralisatrices, il importe d’agir au plus prêt des entreprises.





Quelle que soit la méthode développée, il importe de construire le processus en plusieurs étapes complémentaires et structurantes.

Une première étape concerne la sensibilisation des décideurs en entreprises à la question des travailleurs plus âgés et à la dynamique intergénérationnelle. Rien ne peut se faire sans l’engagement de ces décideurs et sans avoir travaillé sur leurs propres représentations.

Il y a fort longtemps que Michel Crozier, le grand sociologue des organisations, avait montré que l’on ne pouvait changer les choses seulement « par décret » ou par l’annonce d’une volonté. Il faut que le corps social soit convaincu de l’apport du changement. Agir sur la motivation et l’implication des seniors en faisant l’économie d’un travail de fond auprès des décideurs et des cadres des ressources humaines ne peut qu’être dommageable et entraîner une déperdition d’énergie et de moyens. Inutile d’agir si les décideurs ne sont pas convaincus. De même qu’il est central de travailler sur les propres représentations des seniors.

Une deuxième étape est constituée par un temps d’écoute et d’information des personnels concernés. Trop souvent les bilans professionnels, quant ils existent, restent seulement des entretiens formels et superficiels. Le plus souvent personne n’y croit et personne ne s’investit. Dans une collectivité, quelle qu'elle soit, le besoin d’être écouté est central. Être écouté cela veut dire compter. Ne pas être seulement un pion sans responsabilité et sans rôle.

La troisième étape se déroule sur des périodes de 3 à 5 jours en workshop résidentiel, pour permettre aux salariés concernés de faire un point global sur leur situation et leurs attentes, de comprendre les objectifs de l’entreprise et d’y trouver leur place, d’envisager des stratégies d’adaptation professionnelle et personnelle…

Le retour sur investissement d’une démarche de ce type se mesurera grâce à la mise en place d’un baromètre qualitatif de l’implication des quinquas, permettant de comparer l’avant et l’après et de mesurer sur la durée le degré d’adhésion de ces salariés.

Ce baromètre pourra être complété par des données objectives comme, par exemple, le taux d’absentéisme.

On le voit bien face à ce chantier essentiel : il s’agit d’offrir des moyens pragmatiques et efficaces et de faire de contraintes et de risques de réelles opportunités de développement avec un retentissement positif quasi immédiat sur les entreprises et les salariés et par là même sur l’ensemble de la société.

Serge Guérin
Professeur à l’ESG
Vient de publier Vive les vieux !, Editions Michalon
Vitaminer l’emploi des seniors, chronique par Serge Guérin

Article publié le 29/09/2008 à 11:29 | Lu 4196 fois