Au secours ! Je pars à la retraite de Franklin Berrebi (livre)

Franklin Berrebi, cadre de chez L’Oréal à la retraite, vient de sortir aux éditions Timée un ouvrage intitulé : « Au secours ! Je pars à la retraite ». Un livre sous forme de journal dans lequel l’auteur raconte ses tâtonnements face à cette « liberté forcée » qu’est la retraite. Pertinent et impertinent, il aborde tous les grands thèmes de ce véritable phénomène de société : difficulté de rompre avec sa vie professionnelle, nouvelle vie de couple, regard des autres...


Au secours ! Je pars à la retraite
On ne prend pas sa retraite sans affronter une phase d'initiation dont il faut respecter les rites !

Actuellement, on est jugé sur le métier que l'on exerce. C’est dans cet esprit que Franklin Berrebi, par le biais de son livre, lance un cri d’alerte : on vaut ce que l'on est, et non pas ce que l'on fait !

« Au fond, la retraite pourrait devenir le troisième volet d'une vie active bien remplie, après l'éducation et une carrière professionnelle. Une sorte de troisième mi-temps. »

Le livre :

Un jour, vous êtes un super-actif, toujours entre deux avions, deux réunions, deux interviews, deux coups de fil. Le lendemain, vous êtes. Eh bien, vous ne savez plus trop. Ou plutôt, si. Vous êtes un retraité. Un re-traité. Un retrait. et ?

Vous aviez bien moult projets pour ces trente prochaines années, mais voilà : vous en êtes déjà à vous demander ce que vous allez bien pouvoir faire de tout ce temps. Il va falloir trouver une solution. Et vite !

Pendant un an, Franklin Berrebi a donc tenu son journal de jeune retraité. La page blanche sur l'agenda ? Très peu pour lui. Le problème, c'est que personne ne lui a appris comment passer du mode actif à celui de retraité. Personne ne lui a même donné une bonne raison de le faire.

Au secours ! Je pars à la retraite raconte un an de tâtonnements, de rencontres et de doutes. Pour ces bataillons de baby-boomers arrivés à l'âge de la retraite, une chose est sûre : la donne doit changer. Hors de question de finir au placard !

Extraits de l’ouvrage

Samedi 24 juillet
Que vais-je faire de tout ce temps ?

Un samedi peut-il avoir la même saveur pour un retraité que pour un actif ? Ce samedi 24 juillet n'est pas comme les autres. C'est mon premier jour de vacances, et surtout, c'est le premier jour de ma nouvelle vie.

(.) Aujourd'hui, tout peut attendre, il n'y a plus d'urgence, plus de nécessité de décider, d'agir, d'organiser. Dois-je commencer à différer certaines tâches pour mieux les étaler dans le temps et remplir les heures qui s'annoncent creuses ? Ou tout simplement prendre mon temps, ce que je n'ai ni pu ni su faire depuis si longtemps ? Je suis incapable de répondre. Ou plutôt si : il faut que je commence par apprendre à perdre du temps.

Jeudi 23 septembre
Retraité ? Jamais !

(.) Depuis mon départ à la retraite, j'ai appris qu'il ne fallait pas prononcer le mot retraite. Pour l'avoir fait à plusieurs reprises, je sais maintenant qu'il faut tourner ma langue plusieurs fois dans ma bouche avant de répondre. À chaque fois que j'ai eu le malheur de prononcer les huit lettres maudites, on m'a répondu, en ayant pris soin de m'observer de la tête aux pieds, et parfois en mettant une main sur la hanche pour donner plus de poids à la remarque : « Mais vous n'avez pas l'âge ! », ou plus directement : « Vous n'êtes pas vieux pourtant ! » Ou, encore plus difficile à avaler : « On vous a mis à la retraite ? Ce n'est pas grave, ça arrive à des gens très bien ! »

(.) Il y a peu, une amie anglaise qui venait de prendre sa retraite m'a dit : « À partir de maintenant, quand on me demande ce que je fais je réponds : "decoration" (à prononcer avec un accent anglais). » Traduisez : elle fait tapisserie ! C'est sûrement possible pour une jolie femme, mais pour moi, quelle tête feraiton si je répondais la même chose ?

Dimanche 23 janvier
À chacun ses rêves, ses défis, ses ambitions

Aujourd'hui, je fête un anniversaire : voilà six mois que j'ai quitté mon entreprise. Je ne regrette pas ces trente années (.) Mais je reconnais avoir très mal préparé mon départ. Je n'avais pas compris que je ne me contentais pas de me soustraire à la vie professionnelle : si on n'y prend garde, on court le risque de se retirer de toute vie sociale. Il n'existe aucune véritable transition organisée entre le travail et la retraite. Depuis six mois, je tente de créer un statut médian, mais en vérité, il aurait été préférable de décrocher graduellement.

Se soustraire à la vie professionnelle, c'est aussi bouleverser sa vie privée : je me dois de tenir compte de la situation et des aspirations de mon épouse. J'ai lu quelque part que le taux de divorces provoqués par la présence du mari à la maison explosait entre cinquante-cinq et soixante-cinq ans : jusqu'à deux fois plus, comparé aux ménages de moins de cinquante-cinq ans, c'est énorme !

Quand ils ont pris l'habitude de vivre séparés, en dehors du foyer la plus grande partie de la journée, voire de la semaine, les couples passent difficilement le cap de la retraite : certains ne se supportent plus. Moi-même, j'aurais dû davantage tenir compte de la situation d'Ariane avant de quitter mon entreprise. Elle travaille, et son rythme est celui d'une personne active. Si j'avais adopté une existence de « retraité », nos relations se seraient peut-être détériorées.

Au contraire, j'ai choisi de ne pas rester inactif. En travaillant depuis notre appartement, je me suis rapproché de son rythme de travail. Bien sûr, nous échangeons des informations, nous partageons des pauses thé ou café, mais le respect de l'autonomie de chacun est une règle d'airain dont nous n'avons jamais parlé d'une manière explicite.

Contrairement à beaucoup de couples pour lesquels la retraite s'apparente à l'enfer, pour
nous c'est l'inverse. C'est très positif. Quoi qu'on en dise, le travail reste encore la meilleure façon de se sentir intégré à la vie sociale. Je ne me sens pas encore capable de me dégager de cette idée.

Après soixante ans, j'en suis sûr, une vie professionnelle riche de découvertes et d'apprentissages est possible. Travailler à son rythme conserve jeune, physiquement et mentalement. Chacune de mes rencontres me conforte dans cette idée. Même des sujets aussi futiles que des billes où des substituts aux sacs de sables constituent de puissants stimuli et peuvent donner lieu à un maintien en activité. Je me sens capable de démarrer une nouvelle carrière et, tel un jeune actif, je commence à en pressentir les contours.

D'autres feront des choix différents. Par exemple, l'un de mes amis a décidé de gravir le Mont Blanc, et à la saison prochaine, de faire un raid au Népal, objectif Everest ! Pourquoi pas ? C'est un challenge gigantesque qui réclame un engagement très important et une préparation intense. Je pourrais multiplier les exemples de ce type ! À chacun ses rêves, ses défis, ses ambitions. Ce dont je suis totalement sûr aujourd'hui, c'est qu'il ne faut à aucun moment cesser d'avoir une passion, c'est le meilleur médicament pour une retraite heureuse.
 

L'auteur

Franklin Berrebi, né à Tunis en 1943, a effectué l'essentiel de sa carrière chez L'Oréal. Aujourd'hui, il partage son temps entre des missions de conseil et du bénévolat à l'incubateur de l'École Centrale de Paris et auprès de l'Agence du Don en Nature.

Au secours ! Je pars à la retraite
Franklin Berrebi
Préface d'Etienne Mougeotte
216 pages
14 x 20,5 cm
17 euros
ISBN : 978-2-35401-065-2

Publié le 04/11/2009 à 10:01 | Lu 8958 fois