Retraite

Retraites des fonctionnaires : quand les cotisations artificielles gonflent les dépenses publiques


Les retraites des fonctionnaires ne creusent pas un déficit caché, mais elles faussent les comptes de l’État. Une note récente du Conseil d’analyse économique (CAE) révèle que les budgets ministériels et les dépenses publiques sont artificiellement gonflés par des taux de cotisation retraite employeur hors normes, appliqués par l’État pour équilibrer son régime spécial.

PAR SENIORACTU.COM | Publié le 29/09/2025

Un mécanisme comptable qui surestime les coûts de l’État

Depuis 2006, les pensions civiles et militaires sont financées par le compte d’affectation spéciale « Pensions ». Pour équilibrer ce compte, l’État fixe son propre taux de cotisation employeur. Ce taux n’a rien à voir avec la réalité économique : il est ajusté pour compenser le déséquilibre démographique du régime des fonctionnaires. Concrètement, plus le nombre de retraités augmente et celui des actifs diminue, plus le taux appliqué grimpe. Résultat : les coûts de personnel inscrits dans les budgets des ministères apparaissent très supérieurs à la dépense réelle.

Des taux très éloignés du secteur privé

La comparaison est frappante. Dans le privé, le taux de cotisation vieillesse atteint environ 16,6 %. Pour les civils de l’État, il s’élève à 78 % et grimpe à plus de 120 % pour les militaires. Ces écarts s’expliquent par le faible ratio cotisants/retraités et par le poids des primes, souvent exclues de l’assiette contributive. Pour maintenir l’équilibre, l’État gonfle donc artificiellement le taux appliqué sur le salaire de base, ce qui pèse sur les comptes ministériels.

L’Éducation nationale, un budget emblématique

L’Éducation nationale illustre parfaitement cette distorsion. L’Institut des politiques publiques (IPP) avait déjà estimé que son budget était artificiellement alourdi de près de 11 milliards d’euros. Sans ce biais, la dépense éducative passerait de 5,4 % à environ 5 % du PIB, soit un niveau plus proche de la moyenne européenne. Selon le CAE, cette méthode comptable fausse également les comparaisons internationales, renforçant l’idée que la France serait structurellement plus dépensière que ses voisins.

Des conséquences politiques et européennes

Ce mécanisme a des effets bien réels. Il réduit artificiellement les marges de manœuvre budgétaires de l’État, limite les investissements publics et brouille la transparence des finances. Pour l’opinion et les parlementaires, il devient difficile de distinguer la part de dépense réellement consacrée aux politiques publiques de celle résultant d’un choix comptable. Sur le plan européen, la France apparaît plus dépensière qu’elle ne l’est réellement, ce qui complique le dialogue sur le respect des critères budgétaires.

Des pistes de réforme pour plus de transparence

Le CAE propose de revoir la convention de calcul, afin que la cotisation employeur reflète mieux la réalité contributive. Certains élus, à l’image de Charles de Courson, suggèrent de créer une caisse autonome pour les retraites des fonctionnaires, ce qui permettrait de clarifier les flux financiers et de responsabiliser les acteurs. D’autres défendent une convergence progressive avec le secteur privé, en tenant compte des spécificités de la fonction publique.

Un débat technique aux enjeux démocratiques

Au-delà des chiffres, la question est celle de la transparence démocratique. Le CAE résume la situation : « Il n’y a pas de déficit caché, mais un coût salarial surestimé ». Plus qu’une question technique, il s’agit de permettre aux citoyens et aux décideurs d’évaluer honnêtement le coût des politiques publiques. La réforme du système de cotisation des fonctionnaires pourrait ainsi devenir un levier de clarté et de confiance dans la gestion des finances publiques.

Source : Conseil d’analyse économique – Focus n°121 – Retraites des fonctionnaires : pas de déficit caché mais un coût salarial surestimé, 12 septembre 2025



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