La douleur dentaire : signal d’alarme et premier symptôme d’appel du chirurgien-dentiste

Parce qu’il n’y a pas d’âge pour avoir peur du dentiste… Et parce qu’il est important de prendre de soin de ses dents tout au long de la vie, même à un âge avancé, voici un petit point sur les causes de la douleur dentaire, sur les différents types de douleurs dentaires et sur la peur du dentiste. Car douleur et anxiété sont les deux principaux ennemis des soins dentaires !


Les principales causes de la douleur dentaire

Les bactéries, une hygiène bucco-dentaire défectueuse, une mauvaise alimentation, des maladies chroniques, etc. sont à l’origine de caries, d’abcès dentaires, de rages de dents…

Eux-mêmes principalement responsables des douleurs au sein de la bouche.

L’acte du chirurgien-dentiste est alors indispensable pour nettoyer ce qui est infecté et par là même, éradiquer la douleur concomitante. Le geste du chirurgien-dentiste est ainsi à lui seul… curatif.

Deux types de douleurs dentaires reconnues

Il n’y a pas une mais des douleurs, la plus commune est sans aucun doute la douleur aiguë qui s’installe rapidement. Elle est le plus souvent l’élément déclencheur de l’appel au chirurgien-dentiste. Cette douleur aiguë est une réaction de l’organisme qui signale un danger (dans la bouche le plus fréquemment un processus infectieux). Elle peut également découler d’un acte opératoire comme l’extraction d’une dent. Cette douleur est utile ; sa finalité est bien connue. C’est en partie grâce à elle –eh oui…- que l’espèce humaine a pu survivre !

A l’inverse, la bouche peut également être le siège de douleurs chroniques. D’un point de vue médical, il s’agit d’une douleur qui se prolonge dans le temps, généralement au-delà de trois mois et qui peut être considérée comme « inutile » car elle ne renseigne plus sur grand-chose. La douleur chronique présente une grande morbidité. En effet, en plus des processus sensitifs, elle engage une expérience émotionnelle, parfois source de dépression chez les patients qui en souffrent.

Parmi ces douleurs chroniques, les douleurs neuropathiques nées de la lésion d’un nerf sont les plus fréquentes. D’autres douleurs chroniques beaucoup plus complexes dans leurs mécanismes (elles sont dites douleurs dysfonctionnelles) existent comme les douleurs de membres fantômes (une douleur dentaire présente après l’extraction de la dent) ou les stomatodynies (douleurs de brûlures sur la langue ou les muqueuses). Le chirurgien-dentiste peut également se retrouver face à des patients exprimant des douleurs musculaires et/ou articulaires appelées algies et dysfonctions de l’appareil manducateur qui elles aussi demandent une prise en charge spécifique par un praticien formé à ces pathologies.

La bouche : une intimité encore trop souvent sous-estimée

Si l’on a conscience que la bouche est un organe d’une grande intimité, à la fois fonctionnel, sensuel et sexuel, un organe du goût, du toucher, de la sensation, un lieu symbolique, on comprend pourquoi les soins dentaires peuvent être perçus comme intrusifs, incommodants, gênants, générateurs d’anxiété... On ne peut donc pas toucher, s’insinuer dans la bouche sans attention ou sans précaution particulière. Le chirurgien-dentiste se retrouve souvent dans une approche soignante similaire à celle du gynécologue. Par ailleurs d’un point de vue strictement sensoriel, la bouche et tous les organes qui la composent sont très richement innervés et par conséquent particulièrement sensibles. L’ensemble de ces éléments physiologiques et symboliques, conjugués à un inconscient collectif, conduit à générer de l’anxiété chez de nombreux patients, essentiellement lorsqu’il s’agit des soins bucco-dentaires : anxiété de la douleur, des suites opératoires (saignements)…

Douleur et anxiété : les deux principaux ennemis des soins dentaires

La prise en compte de la douleur et de l’anxiété est au cœur des préoccupations de la médecine bucco-dentaire. La douleur et l’anxiété sont en effet responsables d’importants phénomènes de morbidité : évitement ou retard des soins, moins bonne cicatrisation, aggravation de l’état de santé général… 15% des Français répertoriés comme anxieux vis-à-vis des soins dentaires peuvent refuser de se soigner ! Leur état bucco-dentaire se révèle désastreux de ce seul fait.

Il s’agit d’une anxiété pathologique qui peut avoir des conséquences sur la santé générale et la vie sociale de ces personnes. L’anxiété et la peur sont deux émotions intimement liées à l’expérience de la douleur. Elles s’entretiennent dans un cercle vicieux nécessitant, si l’on veut les prendre en charge efficacement, de lutter contre les deux.

La réduction ou la suppression de la douleur au cours des soins dentaires constitue l’un des meilleurs moyens de diminuer significativement l’anxiété générée par ces derniers. De nombreux progrès ont été accomplis en médecine bucco-dentaire: le recours à l’anesthésie locale pour la plupart des actes, l’utilisation d’instruments rotatifs (turbine) et de fraises toujours plus efficaces qui ont permis de diminuer de façon conséquente la douleur générée par les soins.

Une véritable prise de conscience chez les chirurgiens-dentistes s’est opérée afin de mieux évaluer et mieux maîtriser l’état d’anxiété des patients. De nombreux efforts sont réalisés pour aider les patients plus angoissés, comme : une formation universitaire spécifique sur la douleur et l’état anxieux à l’attention des futurs chirurgiens-dentistes ; l’utilisation de méthodes de sédation consciente, pharmacologiques (anxiolytiques, MEOPA) ou non (hypnose, relaxation).

Les traitements de la douleur aujourd’hui et demain
Comme pour toute autre discipline médicale ou chirurgicale, le meilleur traitement de la douleur est la prévention. Ainsi, dans la très grande majorité des cas, l’enseignement d’une hygiène buccodentaire rigoureuse et l’éducation thérapeutique permettent au chirurgien-dentiste de prévenir les principales causes des douleurs de la cavité buccale.

Lorsque cela est nécessaire, notamment après un acte chirurgical, le chirurgien-dentiste prescrira principalement des antalgiques classiquement utilisés pour traiter des douleurs aiguës d’intensité légère à modérée : paracétamol, ibuprofène, codéine, tramadol, voire de la morphine pour des douleurs intenses…

Il peut également avoir recours, dans une approche de sédation consciente, au MEOPA. Il s’agit d’un mélange d’oxygène et de protoxyde d’azote (gaz hilarant) qui a la faculté d’atténuer l’anxiété des patients. Ce dernier a obtenu une autorisation d’utilisation dans les cabinets libéraux en 2009. Cependant, l’utilisation de ce gaz nécessite un équipement particulier et une assistante disponible. Il est de plus en plus utilisé.

La suppression de certains antalgiques (di-antalvic par exemple) n’a pas gêné la pratique du chirurgien-dentiste ni l’étendue de sa prescription. C’est plutôt le patient qui s’est senti désorienté. Aujourd’hui il n’y a pas de nouvelles molécules dans le domaine de l’antalgie dans le cadre de la médecine bucco-dentaire.

Les chirurgiens-dentistes utilisent toujours la codéine et le tramadol. Le chirurgien-dentiste pratique aujourd’hui de plus en plus l’antalgie anticipée, il s’agit de prévenir la douleur avant son apparition en prescrivant des antalgiques avant une intervention délicate. Depuis une dizaine d’années, on assiste au développement de consultations spécialisées dans la prise en charge de la douleur orofaciale.

On en trouve aujourd’hui dans trois villes (Paris, Clermont-Ferrand et Brest). Ces consultations très spécialisées concernent essentiellement les pathologies douloureuses chroniques de la cavité buccale ou de l’articulation temporo-mandibulaire. Il s’agit de consultations pluridisciplinaires qui font intervenir des psychologues ou des psychiatres, des neurologues et des chirurgiens-dentistes. Ces consultations spécialisées restent encore trop peu nombreuses et sont réservées aux cas les plus graves.

Bouche et dents : une innervation douloureuse

La bouche et les dents sont avec les bouts des doigts très richement innervés. Ils sont parmi les organes du corps ayant la plus grande représentation somesthésique. Chaque dent possède en son sein (la pulpe dentaire) de très nombreuses fibres nerveuses qui ont la particularité de ne véhiculer que les sensations douloureuses. La pulpe des dents partage cette caractéristique avec deux autres tissus de l’organisme : les méninges et la cornée. Ainsi, à chaque fois que la pulpe sera agressée, notamment par les bactéries et les toxines qu’elles secrètent (au cours d’une carie notamment), elle ne pourra réagir que par une stimulation douloureuse.

Publié le 15/06/2012 à 08:00 | Lu 11649 fois