DMLA : le point sur les dernières techniques thérapeutiques

Alors que la 7ème édition des Journées Nationales de dépistage de la DMLA se termine aujourd’hui, l’Association DMLA, à l’origine de cet évènement, fait le point sur les dernières techniques thérapeutiques dans le traitement de cette maladie des yeux qui touche les personnes âgées.


Le VEGF (Vascular Endothélial Growth Factor) stimule la croissance des vaisseaux sanguins

Le traitement des DMLA néovasculaires repose donc sur des injections intraoculaires répétées d’anti-VEGF10 (injections intra-vitréennes ou IVT).
 
En freinant la prolifération des néovaisseaux, ces médicaments peuvent stabiliser voire améliorer l’acuité visuelle de certains patients11, et la répétition des IVT permet de maintenir le résultat obtenu. Une surveillance ophtalmologique mensuelle est indiquée pendant plusieurs années (acuité visuelle, fond d’œil, OCT et angiographies rétiniennes* si nécessaire).
La prise en charge thérapeutique est adaptée au cas par cas.
 
(*)OCT : imagerie par Tomographie en Cohérence Optique.
Angiographie rétinienne : photographies du fond de l’œil sensibilisées par l’injection intraveineuse d’un colorant qui imprègne la rétine et ses vaisseaux.

 
Le point sur les anti-VEGF : AMM ou pas ?

Plusieurs anti-VEGF possèdent l’AMM pour le traitement des DMLA néovasculaires. Le ranibizumab (Lucentis, laboratoire Novartis) l’a obtenue en 2007 et le pegaptanib (Macugen, Laboratoire Pfizer), moins utilisé, en 2006. Aucune étude n’a, à ce jour, comparé directement ces deux anti-VEGF.                                                
                                                                         
Le laboratoire Bayer HealthCare a récemment reçu l'Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) de l’aflibercept (VEGT Trap-Eye, Eylea) en Europe. Selon les essais cliniques « VIEW 1 et 2 », l’aflibercept et le ranibizumab semblent équivalents, en termes d’efficacité et de sécurité12.
 
Le bevacizumab (Avastin, laboratoire Roche), voisin du ranibizumab, n’a pas été développé pour une utilisation intravitréenne et ne possède donc pas l’AMM dans la DMLA. Différentes études, dont CATT13 (Comparison of Age–Related Macular Degeneration Treatments Trials), ont conclu à une efficacité comparable du ranibizumab et du bevacizumab, mais l’Avastin semblait induire plus d’effets indésirables.
 
Avastin : la DGS s’est prononcée

- Le 30 juillet 2012, suite à plusieurs signalements d’infections oculaires consécutives à des IVT d’Avastin, la Direction Générale de la Santé a rappelé que l’AMM de ce médicament ne prévoit son utilisation que dans le traitement de certains cancers (prescription par des médecins oncologues, réservée à l’usage hospitalier).
 
La DGS précisait que l’Avastin est utilisé en ophtalmologie hors AMM notamment pour traiter des DMLA et des œdèmes maculaires (dus à un diabète ou à une occlusion veineuse rétinienne), alors que le Lucentis, plus cher, dispose d’une AMM dans ces indications.
 
« Afin de préserver les impératifs de sécurité sanitaire tout en garantissant l’accès à ces traitements, Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales et de la Santé, a demandé que soit envisagée une extension de l’AMM de l’Avastin et que soit réexaminé le prix de la spécialité Lucentis » a-t-elle indiqué.
 
- Le 10 août 2012, à la demande de Marisol Touraine, la DGS, en référence au code de la santé publique, a rappelé que l’utilisation d’un médicament hors AMM est interdite lorsqu’un autre médicament bénéficie lui-même d’une AMM pour la même indication.
 
Un prescripteur peut donc, dans les pathologies ophtalmologiques pour lesquelles aucun autre traitement ne possède l’AMM, utiliser l’Avastin dans le respect des dispositions légales. La ministre des Affaires sociales et de la Santé a demandé que l’ANSM soit saisie afin de réfléchir à la mise en place de recommandations temporaires d’utilisation (RTU) pour ces situations.
 
De nombreuses autres molécules font actuellement l’objet de recherches et pourraient déboucher sur de futurs traitements contre la DMLA, non seulement exsudative mais aussi atrophique.
 
NAT-2 : de nouvelles pistes préventives

NAT-2 16, étude comparative randomisée contrôlée contre placebo, a été réalisée en double insu dans le but d’évaluer l’efficacité d’une supplémentation orale d’acide docosahéxaénoïque (DHA) en prévention de la DMLA exsudative. NAT-2 a porté sur 263 patients âgés de 55 à 85 ans souffrant d’une DMLA néovasculaire unilatérale, dont le deuxième œil présentait des lésions précoces de MLA. Les participants ont reçu chaque jour pendant 3 ans, soit 840 mg de DHA et 270 mg d’acide eicosapentaénoïque (EPA), extraits d’huile de poisson, soit le placebo (capsules d’huile d’olive). 
 
Le critère principal de l’étude était le délai d’apparition d’une néovascularisation choroïdienne dans l’œil étudié. L’incidence de la néovascularisation et l’évolution des taux de DHA et d’EPA dans la membrane cellulaire des globules rouges comptaient parmi les critères secondaires.
 
Résultats de NAT–2 :

- Le délai d’apparition et l’incidence des néovaisseaux dans le deuxième œil ne différait pas significativement entre le groupe placebo et le groupe DHA.

- Dans le groupe DHA, les niveaux membranaires de DHA et d’EPA ont significativement augmenté dans les globules rouges (+70%, p <0,001) témoignant de leur bonne pénétration dans les cellules. Cependant, ce fut également le cas dans le groupe placebo. En effet, certains individus de ce groupe s’étaient supplémentés par eux-mêmes en omega3 (+9%, p = 0,007), ce qui peut expliquer l’absence de différence significative entre les deux groupes.

- Au sein du groupe DHA, les patients dont les niveaux membranaires de DHA et d’EPA étaient les plus élevés courraient un risque significativement inférieur de néovascularisation (réduction de 68%) du risque de DMLA exsudative dans les trois ans).
 
L’acide eicosapentaénoïque (EPA) et l’acide docosahexaénoïque (DHA) sont deux acides gras hautement insaturés de la famille des oméga 3. Chez l’homme le DHA est un constituant important des membranes des disques des segments externes des photorécepteurs (cellules visuelles rétiniennes).
 
Les recommandations 2012 de la HAS

Les nouvelles recommandations de la HAS pour la prise en charge diagnostique et thérapeutique de la DMLA ont été publiées en juin 2012, avant les résultats de NAT-2 et avant l’avis de la DGS concernant l’Avastin).
 
Si ces recommandations reposent dans l’ensemble sur un faible niveau de preuve scientifique, les deux propositions suivantes disposent d’un Grade A (preuve scientifique établie) :

- Le ranibizumab est recommandé en présence de néovaisseaux choroïdiens rétrofovéolaires en injection intravitréenne à la dose de 0,5 mg.

- L’efficacité du pegaptanib en injection intravitréenne toutes les six semaines à la dose de 0,3 mg a été démontrée dans le traitement des néovaisseaux choroïdiens rétrofovéolaires de la DMLA sur la stabilisation de l’acuité visuelle à un an.
 
Il est recommandé :

- De traiter les néovaisseaux choroïdiens de la DMLA exsudative par des injections intravitréennes d’anti-VEGF en monothérapie en première intention.

- D’envisager un traitement combiné (par exemple : anti-VEGF + photothérapie dynamique) au cas par cas.

- De proposer l’arrêt du tabac au patient souffrant d’une DMLA et d’orienter les fumeurs dépendants vers une consultation spécialisée dans le sevrage tabagique.

- De surveiller les patients qui souffrent d’une DMLA atrophique et de leur proposer une consultation rapide en cas de modification des symptômes car cette forme peut se compliquer de néovaisseaux.

Lorsque la baisse d’acuité visuelle devient invalidante, la prise en charge de la DMLA repose sur la rééducation basse-vision (pour apprendre aux patients à exploiter au mieux leur vision périphérique, améliorer leur qualité de vie et contribuer au maintien de leur autonomie) et les systèmes optiques.
 
Moins d’une semaine doit s’écouler entre début des symptômes et la consultation d’ophtalmologie.
Le traitement d’une DMLA exsudative doit débuter moins de dix jours après le diagnostic.
 
La HAS rappelle que :

- L’information fait partie du traitement.

- La photothérapie dynamique** à la vertéporphine ne permet qu’exceptionnellement d’améliorer l’acuité visuelle (elle peut être utilisée en cas de contre-indication ou de non-réponse aux anti-VEGF et dans certaines formes cliniques en combinaison aux anti-VEGF).

- Aucune donnée scientifique ne prouve la relation entre l’exposition à la lumière du soleil et la DMLA, mais qu’en cas d’éblouissement, le port de verres teintés ou solaires peut être proposé.

- En prévision d’une atteinte du deuxième œil : une supplémentation vitaminique peut être proposée, après avoir abordé les règles hygiéno-diététiques, car elles semblent avoir, selon l’étude de cohorte prospective AREDS, un effet protecteur (réduction de 25% du risque de bilatéralisation à cinq ans16). La formulation vitaminique utilisée dans l’étude AREDS n’étant pas commercialisée en France, il est recommandé de conseiller le patient sur le choix de cette supplémentation.
 
Les experts proposent aussi de développer :

- des réseaux de basse vision
- des études comparatives sur les traitements, de manière indépendante pour le financement ;
- d'autres voies d'administration des thérapeutiques ;
- des traitements de longue durée d'action ;
et d’améliorer la prise en charge de la malvoyance.
 
**Photothérapie dynamique : Activation par un laser diode en lumière rouge d'une substance inactive, la
Visudyne, injectée par voie intraveineuse, ce qui déclenche des réactions d'oxydation avec production de radicaux libres induisant la destruction des néovaisseaux
.

Publié le 28/06/2013 à 08:52 | Lu 1801 fois