Schizophrénie : un papa âgé pourrait augmenter les risques de troubles mentaux chez l’enfant…

Plusieurs travaux effectués sur des modèles animaux ou à partir de suivi de cohortes au cours des dernières années suggèrent un lien entre l'âge du père et le risque d'affection mentale. Des expériences effectuées chez la souris ont notamment mis en évidence un lien entre un âge paternel avancé et des déficits de contacts sociaux et de comportements exploratoires, des manifestations présentes dans la schizophrénie et l'autisme. « Plus récemment, une équipe hollandaise a montré que l'âge du père augmentait le risque de développer ces deux maladies. Dans une population de plus de 70 000 personnes, les enfants nés de pères âgés de 40 ans avaient trois fois plus de risque d'être atteints d'autisme par rapport à ceux dont les pères avaient 20 ans » indique un récent communiqué de l’Inserm.





Pour étayer ces suspicions sur la schizophrénie, l'équipe du Pr Franck Schürhoff, Pôle de Psychiatrie du Groupe Hospitalier Chenevier-Mondor, Inserm unité 955, a effectué un minutieux travail de bibliographie afin de répertorier les études portant sur cette pathologie et pour lesquels l'âge du père était connu.

Ils ont trouvé treize études parues entre 2000 et 2009, incluant des dizaines de milliers de patients. « Parmi elles, deux méta-analyses synthétisant les résultats de plusieurs travaux apportent une grande puissance statistique », précise Franck Schürhoff.

Tous les résultats concordent sur le fait que l'âge avancé du père au moment de la conception augmente le risque pour l'enfant de développer une schizophrénie. « A partir de 35 ans, le risque est multiplié par deux, puis augmente de façon linéaire avec l'âge. Au-delà de 50 ans, il est multiplié par quatre », résume Franck Schürhoff. Ce résultat n'a pas été retrouvé pour la mère.

Les auteurs émettent plusieurs hypothèses pour expliquer ce phénomène mais l'apparition de mutations au moment de la spermatogenèse paraît la plus crédible. A 20 ans, les spermatogonies, précurseurs des spermatozoïdes ont subi 200 divisions chez l'homme et 600 à 40 ans. En comparaison, les cellules germinales des femmes ne subissent que 24 divisions pendant la vie foetale. Le risque d'apparition et de transmission de mutations est donc largement plus important chez le père.

La maladie ayant une forte composante génétique, ce phénomène pourrait ainsi expliquer les cas de schizophrénie sporadiques, c'est à dire sans antécédents familiaux. L'équipe de Franck Schürhoff va maintenant étudier la présentation clinique et l'évolution de ces cas de schizophrénies issus de pères âgés. « Si ces personnes présentent des caractéristiques cliniques identiques et forment en quelques sortes un sous groupe homogène de patients, nous pourrions essayer de mieux cerner les mécanismes impliqués dans ces cas de maladie », conclut Franck Schürhoff.

Rappelons que la schizophrénie apparaît le plus souvent chez l'adulte jeune entre 15 et 25 ans. Il s'agit d'une maladie chronique qui présente une grande hétérogénéité dans sa présentation et son cours évolutif. Elle associe des symptômes positifs (délires et hallucinations), des symptômes négatifs (retrait social, ralentissement, émoussement des affects) et une désorganisation de la pensée et des actes mais également des problèmes cognitifs qui se manifestent par des troubles mnésiques, attentionnels et de la concentration. Les traitements antipsychotiques jouent un rôle capital dans la rémission des symptômes et la prévention des rechutes, malheureusement, les traitements ne sont efficaces que dans 50% des cas.

Article publié le 02/08/2011 à 10:54 | Lu 2312 fois