Mieux manger pour mieux dormir

« Nombre de personnes n’ont pas conscience des interactions entre le sommeil et l’alimentation » constate le Dr Joëlle Adrien. « Elles méconnaissent les règles de base, mésestiment le rôle et la nocivité des excitants et font nombre de confusions ». Ainsi, il est fréquent que l’on confonde le fait de s’endormir facilement et de bien dormir. Et, sous prétexte de manger léger, on mange souvent trop peu, au détriment du sommeil.





Bien se nourrir pour bien dormir


Les conclusions des études, toutes cohérentes, s’accordent pour pointer du doigt les mauvaises habitudes alimentaires. « Mieux vaut, si l’on veut bien dormir, éviter les excès et privilégier une alimentation équilibrée et bien diversifiée » conseille le Dr Adrien. « Mieux vaut également respecter les heures des repas et ne pas sauter son petit‐déjeuner ».
 
Au‐delà du respect des règles de nutrition, il est important de prêter attention à l’alimentation du soir. Le dîner revêt, quand on veut bien dormir, une importance toute particulière.

- Manger assez

« Le temps entre le dîner et le petit‐déjeuner du lendemain est long, même chez les petits dormeurs. C’est la plus longue période du nycthémère passée sans s’alimenter » note le Dr Adrien. Si le corps n’a pas ingéré un apport énergétique suffisant, le sommeil en souffre. Il se fragmente, et l’on se réveille. Il faut se nourrir suffisamment le soir pour « tenir » jusqu’au matin.
 
- Des dîners consistants, mais légers

« Pour autant, les repas riches, difficiles à digérer, ne doivent pas figurer au menu. Les viandes en sauces, qui ne passent pas facilement. Les repas riches ont un autre inconvénient : une étude a montré que les repas copieux et riches ne créent pas un climat propice à un bon sommeil en élevant la température au moment de l’endormissement, justement lorsque, physiologiquement, la température corporelle doit au contraire baisser. Le dîner doit donc être assez consistant pour permettre au corps de tenir toute la nuit et assez léger pour être digéré facilement. Un équilibre à trouver ! »
 
- Des glucides au dîner

« Les glucides (féculents) sont plus recommandés que les protéines, lesquelles augmentent la vigilance et donc rendent plus difficile l’endormissement. Un lien positif entre la consommation de sucres rapides (glucides à index glycémique élevé) et l’endormissement a également été montré chez l’adulte comme chez l’enfant »
 
- 2 à 3 heures avant le coucher

« L’heure à laquelle on consomme son repas a aussi son importance, ajoute le Dr Adrien. Un repas riche en glucides est plus bénéfique 2 à 3 heures avant le coucher ».
 
- Créer un rituel

« Un peu de sucre rapide, une banane ou un verre de lait qui contiennent du tryptophane, ou une tisane peuvent être pris juste avant l’endormissement, non seulement pour leur action sur le sommeil mais aussi pour instaurer un rituel qui facilitera le sommeil, recommande le Dr Adrien »
 
- Expérimenter la prise d’aliments bons pour le sommeil, ayant fait l’objet d’études scientifiques, tels que le jus de griottes de Montmorency, qui contient de la mélatonine et qui améliore le sommeil si on le consomme au long cours.

Pourquoi ne pas opter pour une tisane, petit rituel bienfaisant ?

Les tisanes ont deux atouts, selon le Dr Joëlle Adrien. D’abord parce que certaines plantes ont un effet bénéfique sur le sommeil. Mais aussi parce que la dimension rituelle que peut prendre la tisane du soir favorise les conditions d'un bon sommeil : le soir, on prépare sa tisane, on clôt le chapitre de sa journée, on se met tranquillement dans un état propice au sommeil.
 
Certaines plantes sont calmantes, comme le tilleul ou la camomille, qui diminuent l’éveil et l’anxiété et favorisent ainsi l’endormissement. D’autres ont plus directement un effet facilitateur de sommeil, comme la passiflore et le houblon. Parfois, elles combinent les deux actions, comme la valériane. Cette plante a fait l’objet d’un grand nombre d’études contrôlées qui démontrent son effet sur l’anxiété, sans que ce soit net sur le sommeil.
 
« Dès lors que l’on prend des plantes dont l’action a été confirmée dans des essais contrôlés, l’effet rituel d’une tisane est toujours bénéfique », conclut le Dr Joëlle Adrien.

Recommandations pratiques pour optimiser la vigilance pendant la journée

- Eviter les repas copieux

- Fractionner les prises alimentaires

Faire de petits repas composés de d’aliments riches en protéines (viande, poisson, jambon, oeuf, fromage blanc), d’un peu de glucides à index glycémique faible (fruits, pâtes, semoule, pain complet ou aux céréales) et de légumes verts.

- Eviter de consommer des sucres rapides, glucides à index glycémique élevé de type soda, sucreries, glaces, confiture, miel, baguette, en particulier de manière isolée.

- Rester correctement hydraté(e) tout au long de la journée

La couleur des urines est un bon indicateur de l’état d’hydratation. Des urines claires correspondent à un bon état d’hydratation ; des urines foncées et concentrées indiquent une déshydratation.
 
Attention aux excitants

Il reste à bannir les excitants, en particulier la caféine, en sachant qu’il existe des effets cumulatifs et que les abus se paieront en termes de quantité durée et de qualité de sommeil. La caféine compte parmi les plus grands ennemis du sommeil et nul n’ignore son rôle sur la vigilance et son effet délétère sur le sommeil. En revanche, on connaît moins les sources de caféine, qui restent plus ou moins bien localisées.
 
Des sources de caféine plus ou moins bien repérées

Certaines sources sont parfaitement établies. Il y a bien sur de la caféine dans le café, nul ne le méconnaît, même si on ne sait pas toujours que le café robusta est 2 fois plus riche en caféine que le café arabica. La richesse du coca en caféine est, aussi bien, connue des consommateurs depuis qu’on vend des cocas sans caféine. A l’inverse, la teneur en caféine du thé est moins bien identifiée. Même chose pour le cacao. « La présence de caféine dans le chocolat, en particulier dans le chocolat noir, plus riche en cacao, est souvent ignorée » remarque encore le Dr Adrien.
 
Restent d’autres sources potentielles de caféine, plus ou moins reconnues : les boissons énergisantes. Quelle qu’en soit la source, l’effet de la caféine est très variable, certaines personnes y sont très sensibles, d’autres beaucoup moins.
 
Les effets mésestimés de la caféine

La méconnaissance prévaut bien davantage encore dès lors qu’il s’agit de l’impact réel de la caféine. On sous‐estime la durée de l’effet délétère du café, qui se montre bien plus durable qu’on ne le croit en général. « Il existe un effet cumulatif » souligne le Dr Adrien. La concentration maximale de la caféine dans l’organisme n’est atteinte que 30 minutes à une heure après son absorption et elle ne diminue pas à la vitesse de l’éclair ! La caféine a en effet une demi‐vie de près de 4 heures. Résultat : 4 ou 5 heures après avoir ingéré de la caféine, il en reste encore la moitié dans le sang et 8 ou 9 heures après, le quart de la quantité initialement ingérée.
 
On méconnaît également la nature des difficultés générées par la caféine. On se dit qu’un excès de caféine se soldera par un petit retard d’endormissement. À tort ! La caféine n'empêche pas seulement de s'endormir, elle nuit également à la qualité du sommeil. « La caféine fragmente le sommeil et induit des micro éveils » précise le Dr Adrien. Le sommeil est plus léger et moins riche en sommeil lent profond. En résultent un sommeil moins réparateur, des réveils nocturnes et des petits matins moins toniques… Et une envie de café pour se secouer ! Un vrai cercle vicieux. De ce fait, les abus sont non seulement préjudiciables au sommeil, mais aussi générateurs d’accoutumance et de dépendance.
 
Alcool : attention à l’effet retard

« L’alcool agit sur le sommeil en deux temps, avec des effets tour à tour facilitateurs et perturbateurs » explique le Dr Adrien. Dans un premier temps, l’alcool favorise, ou même provoque l’endormissement. Mais dans un second temps, 3 ou 4 heures après, l’alcool perturbe le sommeil, voire provoque une insomnie. La prise d’alcool le soir entraîne en effet une détérioration de la qualité du sommeil, avec un allègement et une fragmentation du sommeil, des réveils nocturnes et parfois des cauchemars en deuxième partie de nuit. « L’effet retard de l’alcool est souvent ignoré » souligne le Dr Adrien. De ce fait, le dormeur perturbé ne comprend pas et n’identifie pas la cause de ses troubles. Le sommeil est d’autant plus perturbé par la prise d’alcool le soir que celle‐ci majore les risques de ronflements et l’apnée du sommeil.

Article publié le 03/04/2015 à 01:00 | Lu 2490 fois