L'âge de départ à la retraite "en question" : les projets "retraite" des candidats (partie 1)

Avancer l’âge de la retraite, le maintenir ou le reculer ? L’âge de départ à la retraite est au cœur de la campagne présidentielle mais modifier l’âge pose de nombreuses autres questions… Le point sur les différentes propositions des candidats à l’élection présidentielle.


Vers un recul de l’âge en France, comme en Europe ?
Actuellement, l’âge légal de départ à la retraite est fixé à 62 ans avec 167 trimestres de cotisation, soit 41 ans et 9 mois (pour la génération née en 1960) et 172 trimestres, soit 43 ans (pour ceux nés à partir de 1973). A noter que 67 ans est l’âge d’obtention du taux plein, quel que soit le nombre de trimestres acquis.
 
Même sans réforme, l’âge moyen de départ à la retraite est au-dessus du minimum fixé par la loi et augmente au fil des ans. En 2021, l’âge moyen de départ à la retraite était, en effet, de 62,9 ans (Source Cnav).
 
Selon les projections du Conseil d’Orientation des Retraites, à législation constante, l’âge conjoncturel de départ à la retraite passerait à 63,7 ans en 2035, à 63,9 ans en 2070. Il serait alors comparable à la moyenne des âges de départ dans les 38 pays membres de l’OCDE, à savoir, 63,8 ans pour les hommes et 62,4 ans pour les femmes.
 
Quelles sont les propositions des candidats ?
Avancer l’âge de départ à 60 ans : Jean-Luc Mélenchon, avec 40 annuités ; Fabien Roussel, à taux
plein, avec une carrière complète, sans plus de précision ; Nathalie Artaud, avec 37,5 annuités
et Philippe Poutou, avec 37 annuités.
 
Âge plafonné à 62 ans : Anne Hidalgo, avec un rétablissement des 10 critères de pénibilité de la loi de 2016 ; Yannick Jadot ; Jean Lassalle ; Nicolas Dupont-Aignan et Marine Le Pen avec une retraite pour carrière longue, à 60 ans pour les personnes ayant travaillé avant 20 ans (avec 40 annuités de cotisation), une retraite progressive entre 60,75 ans et 62 ans pour un début de carrière entre 20 et 24,5 ans et une retraite maintenue à 62 ans pour ceux qui ont commencé à travailler à partir de 25 ans et justifient de 172 trimestres.
 
Reculer l’âge de départ à 64 ou 65 ans : 64 ans pour Éric Zemmour, avec une progression de 3 mois
par an d’ici 2030 ; 65 ans pour Valérie Pécresse, au rythme de 5 mois par an d’ici 2030 et Emmanuel Macron, au rythme de 4 mois par année de naissance de façon à atteindre les 65 ans en 2031.
 
À noter : en 1981, quand l’âge avait été avancé de 65 à 60 ans par Mitterrand, les régimes complémentaires -qui versent une partie importante des retraites des salariés- avaient instauré une cotisation supplémentaire pour financer cette avancée de l’âge.
 
Qu’en est-il chez nos voisins européens
Dans la majorité des États membres, l’âge légal de départ à la retraite avoisine les 65 ans (l’âge réel de départ peut être beaucoup plus important). Ainsi, 19 états membres ont décidé de reculer l’âge légal dans les années à venir et certains ont déjà commencé à le faire de manière progressive, pour aller jusqu’à 67 ans et même au-delà pour certains, comme en Italie et au Danemark.
 
Quelques exemples :
Allemagne : recul progressif depuis 2012 de 65 ans à 67 ans : la génération 1956 part à 65 ans et 10 mois actuellement, la génération 1958 à 66 ans en 2024 et la génération 1964 partira à 67 ans en 2031.
 
Espagne : également un recul progressif de 65 ans depuis 2013 à 67 ans en 2029, pour la génération
1962. Pour certaines carrières, possibilité de départ à 65 ans, s’ils peuvent justifier des 462 mois requis.
 
Angleterre : un recul vers 68 ans est à l’étude mais pas encore voté. Pour le moment, le recul est progressif, par exemple, la génération née à partir de mars 1961 partira à 67 ans en 2028.
 
Pays-Bas : un recul jusqu’à 67 ans en 2024. À partir de 2025, l’âge légal de la retraite sera lié à
l’espérance de vie, soit 8 mois de report par année d’allongement de celle-ci.
 
Autriche : pour les femmes, recul progressif de l’âge légal de 60 à 65 ans entre 2024 et 2033. Cet
âge est déjà de 65 ans pour les hommes. Ces derniers peuvent demander à partir dès 62 ans, sous conditions, mais ils subissent alors une minoration.
 
Zoom sur le recul progressif vers 65 ans
Emmanuel Macron propose de repousser l’âge de la retraite à 65 ans. Ce recul serait progressif, au rythme de quatre mois par année de naissance jusqu’à atteindre les 65 ans pour la génération née en 1969. Au lieu de demander leur retraite en 2031 à 62 ans, ces assurés devraient attendre 2034.
 
Cette étude considère que ce recul pourrait s’appliquer alors dès la génération 1961 qui aura 62 ans en 2023. En effet, les organismes de retraite recommandent de déposer sa demande de retraite entre 4 et 6 mois avant la date d’effet souhaitée pour le versement des premières pensions.
 
Les assurés de la génération 1961 nés en début d’année déposeront probablement leur dossier quand la réforme sera en cours de discussion. Pour cette raison, il est possible que, comme en 2011, le recul ne s’applique qu’aux assurés nés sur la deuxième partie de l’année.
 
Lors de la réforme de 2010, Éric Woerth avait appliqué ce même principe d’un recul de 4 mois par génération pour faire passer l'âge légal de la retraite de 60 à 62 ans. Étaient concernées, les personnes nées à partir de juillet 1951.
 
À noter : le vote du PLFSS 2012 avait accéléré ce recul, passant à 5 mois par génération à partir de la génération 1952. En sera-t-il ainsi si l’âge légal est repoussé à 65 ans ? Ou commencera-t-on par la génération née en 1962 ?
 
Les questions en suspens qui pourraient faire débat
Quel devenir pour les départs anticipés ?
Tous les candidats s’accordent sur ce point : les dispositifs existants devraient être maintenus voire améliorés. Mais sans plus de précisions.
 
Quel calendrier pour les départs anticipés à 60 ans ?
Aujourd’hui, un assuré qui a commencé à travailler avant 20 ans peut bénéficier d’un départ anticipé au titre des carrières longues à partir de 60 ans, dès que sa durée de carrière lui donne droit au taux plein. Ainsi, fin 2022 certains assurés nés en 1961 ou 1962, auront déjà obtenu leur retraite grâce à ce dispositif. En revanche, ceux nés en 1963, qui auront 60 ans début 2023, ne déposeront leur dossier que fin 2022.
 
Est-ce que ces assurés subiront eux aussi un calendrier de recul de l‘âge de départ au titre des
carrières longues ? Quelle génération sera concernée ?
 
En 2010, lors du passage de l’âge légal de 60 ans à 62 ans, la loi Woerth avait assoupli le dispositif de départ anticipé existant - à l’époque réservé à ceux qui avaient commencé à travailler à 16 ans -à ceux qui avaient commencé à travailler à 18 ans et avait ainsi maintenu la possibilité d’un départ en retraite à 60 ans pour les assurés qui avaient commencé à travailler jeunes.
 
En 2012, François Hollande avait annoncé, dans son programme, la retraite à 60 ans pour tous. Mais il s’était finalement limité à élargir le dispositif des carrières longues, à ceux qui avaient commencé à travailler avant 20 ans.
 
Que prévoira la prochaine réforme ? Un recul de l’âge de la retraite anticipée pour carrière longue, un assouplissement des conditions d’accès ou un élargissement de ce dispositif ? Une majoration de retraite pour ceux qui ont commencé à travailler jeune ? Les possibilités de départ au titre des très longues carrières seront-elles maintenues ?
 
Ceux qui ont commencé à travailler à 16 ans et justifient de 8 trimestres de plus que le nombre de trimestres requis pour le taux plein peuvent bénéficier d’un départ anticipé à partir de 58 ans. Les générations nées après 1964, qui auront 58 ans après 2022 devront-elle attendre leurs 58 ans et 4 mois ?
 
Vers un report de l’âge ou l’annulation de la décote ?
Aujourd’hui, les assurés bénéficient d’une retraite au taux plein à 67 ans, même s’ils ne justifient pas de la durée de carrière requise (168 trimestres pour les assurés nés entre 1961 et 1963). Cet âge du taux plein garanti est défini dans le code de la Sécurité sociale comme étant celui de l’âge légal augmenté de 5 années.
 
Si l’âge légal recule de 62 à 65 ans, l’âge du taux plein reculera-t-il de 67 à 70 ans ? Si l'âge d'annulation de la décote est maintenu à 67 ans, le pourcentage de décote sera-t-il réduit ? Il est aujourd'hui de 1,25 % par trimestre d'anticipation.
 
Comment les candidats entendent-ils relever les pensions ?
Pour rappel, le minimum contributif est le seuil en dessous duquel la retraite de base d’un assuré ayant cotisé ne peut descendre.

Son montant est de 652,60 euros brut par mois (pour moins de 120 trimestres cotisés) et majoré à 713,11 euros/mois (pour 120 trimestres cotisés ou plus). Ce dispositif, accordé sous conditions de ressources suppose d’avoir droit à une retraite au taux plein ou d’avoir attendu l’âge d’annulation de la décote.
 
D’autre part, l’ASPA (Allocation de Solidarité aux Personnes Âgées) permet d’assurer un minimum
de revenus aux personnes âgées disposant de faibles ressources à partir de 65 ans. Presque tous les candidats sont d’accord pour relever le montant de retraite à un minimum.
 
Certains précisent que ce droit sera accordé pour une carrière complète. Mais l’articulation des dispositifs existants devra être précisée et les conséquences du recul potentiel de l’âge d’annulation de la décote sur le minimum contributif devra être revu.

Publié le 06/04/2022 à 01:00 | Lu 4780 fois