Journées Européennes de la SFC : le point sur les cellules souches en chirurgie cardiaque

Les 24èmes Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie se sont tenues la semaine dernière à Paris, au Palais des Congrès. Aujourd’hui, des experts font le point sur nos connaissances actuelles en matière de cellules souches en chirurgie cardiaque.


Dans l’infarctus aigu du myocarde, la procédure est aujourd’hui bien standardisée :

- revascularisation précoce de l’artère « coupable »,
- prélèvement de moelle sanguine du patient,
- puis injection des cellules de la moelle osseuse (appelées cellules médullaires) dans l’artère précédemment ré-ouverte.
 
L’angine de poitrine réfractaire représente une seconde indication potentielle. En effet, des résultats expérimentaux et cliniques avec des sous-populations de cellules médullaires se sont avérés assez convaincants.
 
Ces cellules ont la capacité de sécréter des facteurs de croissance susceptibles de stimuler la formation de nouveaux vaisseaux sanguins. Les cellules médullaires sont injectées à l’intérieur du muscle cardiaque. Ce traitement est indiqué pour les angines de poitrine réfractaires malgré les revascularisations et les médicaments.
 
Mais il semble bien que, du moins en Europe (la prise en charge est manifestement différente aux Etats-Unis), il y ait finalement assez peu de malades qui entrent dans cette catégorie.
 
L’insuffisance cardiaque représente sans doute à terme la meilleure indication de la thérapie cellulaire. En effet, certaines formes graves d’insuffisance cardiaque, rebelles aux traitements habituels n’ont pas atteint un stade d’irréversibilité. Il est important de souligner que la thérapie cellulaire ne révolutionnera pas la prise en charge de l’insuffisance cardiaque pas plus qu’elle ne se substituera à des traitements déjà validés. Elle peut toutefois s’imposer comme un complément utile de ces traitements dans des indications bien ciblées.
 
Dans la thérapie cellulaire, trois problèmes doivent encore être résolus :

Le type cellulaire
Traditionnellement, l’objectif de la thérapie cellulaire est de transformer des cellules greffées en cellules musculaires qui pourront s’intégrer, électro-mécaniquement, dans le muscle cardiaque hôte. Les cellules injectées auraient pour principal effet d’activer les fonctions des cellules cardiaques. Le muscle cardiaque serait ainsi « régénéré » à partir des propres cellules du receveur.
Cependant, il est aujourd’hui admis que les cellules qui ont ouvert la voie (cellules souches de muscle ou de moelle sanguine) ne sont pas les plus efficaces et qu’il faut plutôt privilégier les cellules :
- dont les caractéristiques se rapprochent le plus de celles du tissu cible,
- qui possèdent de ce fait la capacité de produire des facteurs cardio-inducteurs spécifiques.
 
L’origine des cellules
Si, dès le départ, ce sont les cellules issues du patient lui-même qui ont été privilégiées, on a aujourd’hui appris à reconnaitre leurs limites :
- contraintes logistiques,
- coûts élevés des contrôles qualité individualisés,
- variabilité de la fonction cellulaire d’un patient à l’autre (rendant aléatoire l’obtention d’un produit standardisé),
- altération fréquente de cette fonction due à la pathologie sous-jacente (athérome et diabète, notamment).

Aussi le modèle aujourd’hui privilégié est plutôt celui de cellules allogèniques, c’est-à-dire dont le génotype est différent de celui du receveur. Ces cellules sont issues de banques dûment validées sur le plan fonctionnel, ce qui permet une utilisation presque immédiate du produit en cas de besoin. La contrepartie de cette origine étrangère des cellules est naturellement un risque de rejet, avec toutefois une pérennité du greffon cellulaire qui n’est peut-être plus nécessairement un pré-requis absolu.

La préservation du greffon
Même si l’objectif n’est plus que les cellules greffées forment un néo-myocarde, encore faut-il qu’elles soient présentes dans le tissu hôte assez longtemps pour pouvoir sécréter les facteurs cardio-inducteurs. Or on sait qu’une fois injectées, ces cellules sont en général très rapidement détruites.
 
C’est là qu’intervient un aspect plus récent et majeur de la thérapie cellulaire : l’introduction des techniques d’ingéniérie tissulaire. L’utilisation de biomatériaux va permettre de reconstituer un micro-environnement tridimensionnel indispensable à la viabilité et la survie des cellules greffées. De nombreux polymères, naturels ou synthétiques, ont déjà été évalués ; certains sont cliniquement utilisables et il apparait clairement que le bénéfice apporté par ces cellules implique qu’elles soient désormais greffées avec un support matriciel et au mieux vasculaire.
 
Si, à l’avenir, il se confirme que l’effet des cellules consiste principalement à sécréter des facteurs cardio-inducteurs et si les principaux d’entre eux peuvent être précisément caractérisés, alors il devient envisageable de les utiliser seuls, incorporés dans des biomatériaux usinés de façon à en permettre la libération contrôlée. Cette thérapie cellulaire sans cellules pourrait alors voir sa diffusion s’élargir au sein des traitements de l’insuffisance cardiaque.


Publié le 22/01/2014 à 09:00 | Lu 516 fois