Et oui, les vieux pauvres, cela existe ! chronique de Serge Guérin

Le dernier rapport sur le mal logement de la Fondation Abée Pierre met opportunément l’accent sur la condition de pauvre d’une partie des plus âgés.





Les experts de la Fondation reprennent le chiffre fatal que nous sommes nombreux à mettre régulièrement en avant lorsque les spécialistes du discours en faveur d’une guerre des générations attaquent sur les « privilèges » de la génération des seniors.

Il y a en effet 600 000 personnes âgées de plus de 60 ans qui vivent sous le seuil de pauvreté, qui vivent avec moins de 650 euros par mois. A cette population, il faudrait ajouter une large partie de ceux qui disposent de revenus liés à une retraite réduite du fait d’un parcours professionnel ayant généré des revenus modestes.

Rappelons aussi que le mal logement n’est pas seulement l’apanage de personnes âgés non propriétaires. Beaucoup de vieux n’ont plus les moyens de s’occuper seuls ou de financer les différents travaux nécessaires à la rénovation et au maintien en bon état de leur domicile.

Rappelons que le discours opposant les générations repose pour une large part sur la volonté de poser que tous les seniors sont des privilégiés et qu’à l’inverse, les jeunes ne sont que victimes. On voudrait que la lutte des âges ait remplacé la lutte de classe. Pourtant, les choses sont plus complexes et les inégalités sont plus importantes au sein de chaque génération qu’entre les générations. Autrement dit pour devenir un vieux riche, il faut le plus souvent commencer par être un jeune riche.

Inutile de vouloir opposer jeunes et seniors sur ce plan. Au sein de ce que l’on peut nommer la population des jeunes, certains sont largement diplômés et insérés dans la société. Une étude récente (USG Start People/Ifop) montre d’ailleurs que si 66% des jeunes étaient en contrat précaire dans leur premier poste, plus des deux tiers des jeunes actifs sont actuellement en CDI.

Cependant, n’oublions pas que 150.000 jeunes sortent chaque année du monde scolaire sans réelle qualification. Ces derniers démarrent dans la vie sur un échec et sans grande perspective. Quelle désespérance. De l’autre côté de la rive générationnelle, plusieurs millions de retraités vivent chichement. Des femmes seules, en particulier, dont les carrières professionnelles ont été interrompues et dont les ressources sont faibles et fragiles.

Serge Guérin
Professeur à l’ESG
Vient de publier La société des seniors!, Editions Michalon

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Article publié le 02/03/2009 à 01:23 | Lu 6991 fois