Successions : la protection du conjoint survivant

Avant les lois du 3 décembre 2001 et du 23 juin 2006, le conjoint survivant n’était pas un héritier à part entière. Ses droits dans la succession différaient selon la qualité et la présence d’héritiers. Sa situation ne pouvait être améliorée qu’en présence d’un testament ou donation, ou en cas de mariage avec le régime de la communauté des biens. Le législateur a dû adapter la loi aux évolutions de la société et prendre plus en considération le conjoint survivant.


Quelles sont ces évolutions ? Quels sont les moyens de protection du conjoint survivant ?
 
S’il existe aujourd’hui une protection légale qui lui est plus favorable, sa situation reste toujours précaire.
 
Il est donc préférable d’envisager une protection contractuelle afin de lui assurer un avenir plus certain.
 
Protection légale à défaut de libéralité

L’article 732 du Code civil énonce le « conjoint successible est le conjoint survivant non divorcé ».
 
- Les droits du conjoint survivant sur le logement
Deux solutions s’offrent au conjoint survivant non divorcé au moment du décès, pour le logement qu’il occupe effectivement à titre d’habitation principale.
 
Si le logement appartient aux époux ou dépend totalement de la succession, le conjoint survivant a le droit d’en bénéficier ainsi que du mobilier afférent compris dans la succession, durant un an après le décès. Si le logement est occupé via un bail de location, les loyers seront remboursés au fur et à mesure au conjoint survivant par la succession. Ce droit est donc gratuit pour lui. Les héritiers ne peuvent contester cette occupation, car elle est d’ordre public.
 
L’époux survivant a également un droit d’habitation et un droit d’usage sur le mobilier afférent, compris dans la succession, mais le défunt peut l’en priver par testament. Si le conjoint survivant souhaite occuper le logement jusqu’à son décès, il a un an pour le faire savoir. Cependant ce droit n’est pas gratuit, il entraine une réduction des parts du conjoint survivant. Il peut aussi décider de transformer le logement viager en une rente viagère ou en capital.
 
- Les droits du conjoint survivant en sa qualité d’héritier de la succession 
La situation du conjoint survivant dans la succession n’est pas la même selon la qualité des héritiers existants.
 
En présence de descendants, le conjoint survivant choisi soit l’usufruit sur l’intégralité des biens de la succession, soit la nue-propriété du quart des biens, possible uniquement si les héritiers réservataires sont issus du couple.
 
En présence d’ascendants, la succession sera partagée par moitié entre l’époux survivant et les parents du défunt. Le conjoint survivant n’a pas de part minimale qui lui revient de droit. Le défunt peut le priver de tout héritage en léguant le tout à ses héritiers. Le conjoint survivant bénéficie automatiquement d’un quart du patrimoine uniquement lorsqu’il n’y a aucun descendant.
 
La situation du conjoint survivant étant encore précaire, il est primordial que les époux organisent leur avenir par contrat ou testament. 
 
Protection contractuelle et testamentaire du conjoint survivant :

Les époux peuvent décider par testament de la répartition des biens entre les divers héritiers. Le couple devra obligatoirement respecter la part réservée aux enfants. Seule la quotité disponible peut être transmise au conjoint survivant ou à une autre personne.
 
Le mariage permet aussi d’organiser la succession. Le régime de la communauté universelle suppose que le patrimoine commun sera attribué pour moitié au conjoint survivant. Il est possible de prévoir une clause entrainant la propriété intégrale de l’ensemble des biens, hors succession, par le conjoint survivant. Les clauses de répartition inégale ne sont envisageables que lorsque les époux étaient mariés sous le régime de la communauté des biens universelle ou non.
 
Le Code civil prévoit que « les époux pourront, par contrat de mariage, se faire réciproquement ou l’un des deux à l’autre » donation des biens qu’ils ont ou auront afin de prévenir l’avenir du survivant. Il est également possible de procéder à une donation ordinaire hors contrat de mariage où chacun des époux fait don de ses biens successoraux ou une partie d’entre eux à l’autre.
 
La loi autorise également l’insertion d’une clause préciput dans le contrat de mariage qui ne sera pas considérée comme étant une donation, mais qui permet au conjoint survivant de prélever dans la succession un bien ou de l’argent avant les héritiers réservataires. 
 
Il est fréquent que les conjoints souscrivent aussi un contrat d’assurance vie. Selon la nature de cet acte, il ne sera soumis à aucune fiscalité et ne sera pas compris dans la succession. Le conjoint survivant bénéficiera ainsi du capital et des intérêts présents dans ce contrat. Attention toutefois aux primes excessives ou inutiles portant atteinte à la réserve, qui pourront être requalifiées en donation.
 
Si la loi a évolué en faveur du conjoint survivant, il est aujourd’hui toujours recommandé d’organiser par contrat ou testament sa succession.
 


Successions : la protection du conjoint survivant
Amélie Jourdan, Juriste
Sous la Direction de Maître Jacques KAPLAN, Avocat au Barreau de Paris

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Publié le 07/04/2014 à 06:25 | Lu 4583 fois