Malentendance : des Français mal informés et peu équipés (partie 1)

Si d’une manière générale, quand on voit mal on s’achète des lunettes, en revanche, quand on entend mal, on a souvent tendance à ne pas s’équiper… Pourquoi ? Quelles sont les raisons qui font que les Français et notamment les seniors laisse ce sens de côté ? Le point avec la société Sonalto, spécialiste des assistants d’écoute.





On estime que 80% des personnes équipées d’une aide auditive le sont après un diagnostic de presbyacousie, un trouble auditif correspondant à une baisse progressive de l’audition liée au processus naturel de vieillissement.
 
Rappelons que la presbyacousie est la première cause des surdités de perception, qui sont les surdités les plus fréquentes. Elle se traduit par une déperdition de la perception des sons aigus et empêche ainsi une bonne compréhension des mots : en d’autres termes, la personne entend mais ne comprend plus.
 
Si les pertes auditives qu’elle provoque sont très variables d’un individu à l’autre, la presbyacousie concerne tout le monde un jour ou l’autre, avec une perte moyenne de 0,5 décibel à partir de 65 ans, de 1 décibel par an à partir de 75 ans et 2 décibels par an à partir de 85 ans.
 
« En réalité » précise le Professeur Philippe Romanet, médecin ORL à Dijon, « la presbyacousie peut intervenir dès la petite soixantaine quand ce n’est pas plus tôt. Elle peut être beaucoup plus précoce selon les individus et souvent majorée par des facteurs associés comme le diabète ou l’exposition au bruit. Elle va toucher à des stades et des âges différents toute la population et va s’aggraver à mesure que l’on avance en âge ».
 
La gêne provoquée par la presbyacousie croît au fil des jours pour devenir rapidement handicapante. D’abord, et de manière insidieuse, sur le plan physique, la difficulté à comprendre les conversations entraine un état de sur-vigilance et donc une fatigue anormale...
 
Puis, rapidement sur le plan social, l’entourage a tendance à exclure progressivement des conversations le presbyacousique par commodité ou bien ce dernier se met délibérément en retrait pour contourner ses difficultés. Qu’elle soit subie ou adoptée par défaut par la personne presbyacousique, cette mise à l’écart a un retentissement psychoaffectif sévère.
 
Le retrait de la vie sociale s’accompagne fréquemment de troubles de l’humeur et d’états dépressifs avec pour conséquence majeure à terme chez l’individu un déclin cognitif et un risque de perte d’autonomie.
 
Mauvais dépistage/Prise en charge tardive /Solutions trop coûteuses
Le déficit d’information sur la presbyacousie joue en la défaveur d’un dépistage et d’une prise en charge précoces. Le plus souvent, ce n’est que lorsque la famille se plaint de l’audition de son proche qu’une action vers un parcours de soin est entreprise, or à ce stade, la perte d’audition est déjà de 35dB, voire davantage.
 
Dans notre société, la presbyacousie reste très largement méconnue du grand public, plus accoutumé à voir des publicités et campagnes d’information concernant les troubles de la vision tels que le glaucome ou la DMLA (à qui la faute ?). Conséquence : seuls 47% de nos compatriotes ont déjà consulté un médecin ORL pour un problème d’audition, quand ils sont 98% à s’être rendus chez l’ophtalmologiste en cas de problème de vue.
 
Le caractère progressif de l’atteinte, et le fait qu’elle soit le fruit d’une dégénérescence naturelle propre à tout sujet âgé, tend par ailleurs à la « normaliser » dans l’inconscient collectif et à retarder, voire empêcher, sa prise en charge jusqu’à un terme où cette dernière devient complexe et/ou insatisfaisante.
 
Interrogés sur la qualité de leur audition dans le cadre de l’étude Opinion Way « Les Français de 45 ans et plus et l’audition », deux Français sur dix âgés de 45 ans et plus déclarent qu’elle est moyenne ou mauvaise. Pourtant, lorsqu’on les invite à préciser l’âge auquel ils sont susceptibles d’avoir à s’équiper d’un appareil auditif, ils répondent « 71 ans », ce qui correspond à l’âge réel d’équipement effectivement constaté, seuls 14% d’entre eux étant par ailleurs déjà équipés d’une prothèse auditive.
 
De fait, le Professeur Romanet le constate tous les jours : « La majorité d’entre eux méconnait cette pathologie et nombreux sont ceux qui sont surpris à l’annonce du diagnostic. Leurs proches sont en général plutôt soulagés de l’existence d’une surdité qu’ils soupçonnaient. N’ayant pas forcément conscience de la gravité de la pathologie, ou pour certains la négligeant, les patients réagissent de façon très différente à  la prescription d’un appareil auditif : certains sont réticents à en porter une, arguant que leur vie n’est pas très perturbée, d’aucuns s’inquiètent de l’aspect esthétique et/ ou du coût de la prothèse auditive qui est assez mal remboursée, d’autres enfin, exerçant souvent des métiers intellectuels qui nécessitent une bonne audition les acceptent un peu plus volontiers. »

Article publié le 11/10/2017 à 02:23 | Lu 1577 fois