Les femmes seniors SDF : un impératif absolu, se protéger des agressions…

La Mipes, organisme rattaché à la région Île-de-France a présenté cette semaine une étude sur les femmes SDF de plus de 50 ans… Outre le fait de manger, dormir, se laver, qui demande déjà une énergie et un sens de l’organisation considérable, leur impératif absolu reste de se protéger des agressions !


Globalement, plus d’un tiers (37%) des SDF sont des femmes, et cette proportion croit de manière inquiétante. Certaines, comme cette veuve de 61 ans, sont à la rue depuis trois mois. D'autres y vivent depuis quinze ans.

Pourquoi vivent-elles dehors ? Comment se protègent-elles des agressions, entre autres sexuelles, de leurs compagnons d’infortune ? Comment font-elles pour l’hygiène, beaucoup plus importante pour les femmes…

Concrètement, le ressenti d’une femme à la rue est complètement différent de celui d’un homme (honte, image de la mère, déchéance…). Leur survie s’organise d’une part en fonction de l’identité féminine définit par la société et d’autre part, en fonction d’un impératif absolu : se protéger des agressions.

Comme le souligne cette étude, dans la rue, l’identité féminine reste souvent envisagée, à la fois comme une construction sociale, mais aussi comme le résultat de caractéristiques supposées naturelles du sexe féminin :
- attributs moraux et esthétiques : discrétion, dévouement, pudeur, retenue, beauté. Les femmes soignent le plus possible leur apparence, tentent de correspondre -dans la mesure du possible- à l’image de la femme « socialement intégrée ».
- attributs sociaux : maternité, gestion du foyer. Les femmes en couple reproduisent l’organisation classique du couple traditionnel : elles s’occupent du foyer, même lorsqu’il est réduit à sa plus simple expression : une tente !

Les peurs et violences spécifiques aux femmes :
Les violences faites aux femmes sont multiples et proviennent d’agresseurs variés (hommes naturellement, autres femmes, membres de la famille, ou institutions sociales). Pour se protéger, elles élaborent des stratégies parfois contraires : la solitude des parkings, des halls d’immeuble vs le couple pour se protéger ; la visibilité (protection de la proximité d’un commissariat) vs la recherche d’invisibilité (parking, tente dissimulée) ; ou encore, les centres d’hébergements durables qui constituent pour elles une véritable protection, alors que les hébergements d’urgence les isolent et les fatiguent.

Toujours selon cette étude, la peur de l’agression restreint leur possibilité de circulation. Ainsi, lorsqu’elles sont en centre d’hébergement durable, certaines sortent très peu par crainte de l’extérieur et de ses dangers. De fait, elles subissent une grande solitude relationnelle et affective. Leurs relations avec la famille sont quasiment inexistantes, soit à la suite de cassures, soit parce que ces femmes refusent de montrer leur situation. Leurs relations amicales tendent à devenir utilitaires ; quant aux relations de couple, elles semblent ne servir que de protection…

L’organisation de la vie à la rue :
Manger, dormir, se laver demande une énergie et un sens de l’organisation important. Plusieurs stratégies sont déployées, en lien étroit avec le type d’hébergement. Mais en dehors de la recherche d’un toit, leurs activités quotidiennes reproduisent les schémas d’organisations de vie des femmes des milieux populaires : la recherche d’emploi ; les activités domestiques (sous la tente ou en centre d’hébergement) ; les démarches administratives : percevoir le RMI sans interruption relève de la gageur ; et l’accession aux soins

Leurs rapports avec les institutions…
Des attentes sans réponse adéquate : la recherche d’un endroit pour dormir sur le mode de l’urgence demande à ces femmes une grande débauche d’énergie avec peu de résultats en termes de repos. Et finalement, ces hébergement d’urgence ressemblent surtout à de la mise à l’abri temporaire contre les risques d’agression (physique ou vol), même si la crainte les poursuit au sein même de ces centres.

D’autre part, elles ne se sentent pas entendues dans leurs demandes de soutien et d’aide. Elles ne comprennent pas les modes de fonctionnement des institutions (le RMI « disparait » souvent pour des raisons opaques, les avocats commis d’office ne font pas leur travail, etc.).Enfin, faute de couverture maladie universelle ou d’hébergement stable, certaines femmes ne se soignent pas…

Par contre, ces femmes SDF seniors ont plutôt une opinion positive des services de police lorsqu’ils participent à l’élaboration de leur stratégie de protection (ce n’est cependant pas le cas des femmes étrangères). D’autre part, elles apprécient également les hôpitaux, où certaines ont reçu une aide médicale, bien sûr, mais aussi une aide administrative.

Cette enquête a été réalisée auprès de 26 femmes interviewées dans la rue, dans des centres d’hébergement, des permanences sociales ou des centres d’accueil de jour, de 50 à 65 ans sans conditions de ressources.
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Publié le 21/01/2009 à 16:30 | Lu 10312 fois