Génération Proches en Normandie : aidant et après ? (Partie 3)

Marie-Claire et Jean-Pierre : amoureux dans la vie comme dans la maladie… A Rouen vit un couple de retraités unis depuis déjà 42 ans, qui conservent leur jeunesse et leurs passions malgré la maladie. Tous deux souffrent de pathologies graves et dégénératives –sclérose en plaques pour elle, Parkinson pour lui.





A l’annonce respective de leur diagnostic, les retraités ont fait le choix commun de s’unir dans l’adversité, sans perdre leur amour ni leur autonomie.
 
Marie-Claire raconte que c’est son mari qui lui a appris « à vouloir », encore et toujours. De même, c’est dans les yeux de sa femme que Gérald affirme trouver la fin de ses phrases rendues difficiles par la maladie de Parkinson.
 
Pour eux, la maladie –à l’origine d’un volontarisme insoupçonné– est un ciment du couple. Aujourd’hui entouré d’un réseau médical et associatif performant, le binôme a su mettre en place un mode de fonctionnement solidaire et efficace pour combattre la maladie et essayer de s’assumer seul en réalisant individuellement des tâches au quotidien. C’est dans leur amour réciproque et dans leur ambition commune de « faire comme tout le monde » qu’ils combattent la maladie.
 
Se reconstruire après la séparation

Etre aidant d’un proche atteint d’une grave maladie, ce n’est pas un travail à mi-temps. Bien souvent, l’aidant met toute sa personne pour accompagner le malade. « J’étais son repère. Et lui, il emplissait mes journées », nous livre Jacqueline, veuve après 20 ans à aider de son mari.
 
Quelles que soient les circonstances de la séparation, décès, entrée en institution, ou même guérison… l’aidant doit tout reconstruire. Pas facile de retrouver son autonomie quand a perdu l’habitude de s’occuper de soi-même, et que chaque journée obéissait à une routine régie par la maladie.
 
La séparation est compliquée pour l’aidant qui se retrouve seul, sans ambition personnelle depuis longtemps, et qui traverse une séparation –voire un deuil– rendue encore plus rude par la relation aidant-aidé. Parfois même, l’aidant doit faire face à une guérison soudaine et improbable. L’aidant doit se trouver une nouvelle utilité. Avec seulement 403 habitants pour un médecin en Normandie, le suivi de l’aidant n’est pas toujours évident à assurer.
 
Quand la Normandie aide les proches de ses malades à passer la main

« On pourrait penser que « l’après » soulagera les accompagnants, mais ce n’est pas aussi simple » explique la responsable du Centre Local d'Information et de Coordination gérontologique de Rouen. C’est un regain de liberté dont l’aidant ne profite pas toujours et qui est souvent accompagné d’isolement, d’une lourde gestion pratique incluant déménagement, paperasse et déplacements, et d’une incapacité à décrocher de ses responsabilités.
 
Entre visites régulières de son proche malade, solitude dans l’attente d’un coup de téléphone et ennui, l’ancien-aidant est vite susceptible de tomber dans une dépression sévère. C’est ainsi que les institutions médicales ont instauré une prise en charge des anciens aidants afin de les sortir de leur isolement et de réaménager leurs journées autour de leurs propres intérêts.
 
Elodie Durand, neuropsychologue à l’UNA Bocage Ornais, rappelle souvent aux aidants : « Pensez aux centres d’intérêt que vous aviez avant ». Et même s’il n’est « pas facile pour les aidants de passer la main », ce que souligne un praticien hospitalier gériatre, ce suivi est souvent nécessaire pour que la douleur de la séparation disparaisse.
 
Propos recueillis par Natacha Czerwinski, journaliste

Génération Proches est accessible gratuitement sur l’ensemble des supports digitaux (web, smartphone, tablette) sur www.generation-proches.com. Le 6 octobre 2013, dix nouveaux chapitres viendront compléter les trois chapitres en ligne.

Article publié le 12/09/2013 à 05:00 | Lu 1225 fois