Faire de notre longévité une richesse (étude)

« Alors que le Québec est confronté à un choc démographique majeur, le vieillissement de la population constitue une opportunité de création de richesse collective et il est impératif de mettre en valeur tout le potentiel que représente l’amélioration de la longévité » déclarait récemment l'économiste Claude Castonguay, invité au Cirano, à l’occasion de la publication d’un rapport intitulé « La longévité, une richesse »*





Posant un regard nouveau sur les enjeux liés au vieillissement de la population, le rapport traite notamment du lien entre la croissance de la population active et la croissance économique, démontrant une corrélation étroite entre ces deux variables.

Au Québec, d’ici moins de cinq ans, la population des 20 à 64 ans diminuera et les départs à la retraite ne seront plus compensés par l’arrivée de nouveaux travailleurs. Cette diminution de la population active implique une diminution du rythme de croissance de l’économie et, par voie de conséquence, des recettes de l’Etat et des salaires. « Indirectement, si nous n’agissons pas, le vieillissement de la population québécoise pourrait compromettre la pérennité des programmes de santé, des services sociaux et de sécurité du revenu » souligne le communiqué du Cirano.

Dans ce contexte, cette intéressante étude met en lumière le fait qu’une croissance anémique de l’économie du Québec aurait des impacts négatifs au niveau collectif sur les finances publiques et l’apparition de déficits structurels et, pour les individus, en raison du freinage de la croissance de leurs salaires.

Favoriser le vieillissement actif

Comment contrer ces effets ? C’est la question qui fait l’objet de ce rapport.

S’inspirant du concept de vieillissement actif, qui vise entre autres à permettre à chaque personne de travailler plus longtemps si elle en est capable et en éprouve l’envie, l’étude fait ainsi écho à des préoccupations de plus en plus présentes au sein des pays occidentaux, où la mise en place de mesures favorisant la pleine participation des travailleurs plus âgés au marché du travail permet de contrer dans une large mesure les effets négatifs du vieillissement de la population comme celui auquel est confronté le Québec.

Une participation accrue dans le marché du travail

Les travaux présentés démontrent qu’une hausse du taux d’activité des travailleurs aurait un impact positif sur le PIB, et une influence à la baisse sur les déficits de l’Etat, permettant d’éviter la perspective de déficits structurels provoqués par la décroissance de la population active.

Toujours selon cette étude, le vieillissement actif aurait des répercussions nettement positives sur les ressources financières dont disposent les individus, qui actuellement sont souvent mal préparés financièrement à la retraite. Il est également démontré que l’exercice d’un rôle productif est bénéfique, tant au plan physique que psychologique.

Les études consultées et les expériences internationales observées illustrent en effet que, au plan personnel, un maintien en emploi comporte des avantages importants pour les hommes et les femmes qui ont opté pour un tel choix : amélioration de leur situation financière, tant avant qu’après la retraite ; effets positifs sur leur santé physique et mentale ; et satisfaction et sentiment d’utilité et d’accomplissement.

L’étude met également en lumière que, selon les prévisions, plus de 700.000 emplois seront à combler d’ici 2012 au Québec, et ce, dans une perspective de plafonnement suivi d’une diminution de la population des 20 à 64 ans. Dans un tel contexte, la question de la demande de main d’œuvre ne se pose guère, reste celle de l’employabilité. En contexte de pénurie de main d’œuvre, la capacité du Québec à favoriser la participation accrue de ses travailleurs plus expérimentés constitue ainsi un atout économique important.

Le constat du rapport d’étude est clair, souligne encore le communiqué du Cirano : « pour maintenir la croissance économique à un niveau souhaitable, les travailleurs québécois, particulièrement les aînés, vont devoir travailler davantage ». « Heureusement, il n’est aucunement question de forcer le report de la retraite, mais de le rendre possible pour le grand nombre qui le souhaitent, sachant qu’ils seront les premiers à en bénéficier, tant au plan financier que personnel » à précisé à cette occasion Claude Castonguay.

L’urgence d’agir
A la lumière des observations du rapport d’étude et des risques économiques liés au statu quo, l’objectif de hausser les taux d’activité en corrélation avec la longévité accrue est capital. S’inspirant de leurs constats et des expériences ailleurs dans le monde, diverses mesures pour s’attaquer à cet enjeu sont identifiées par les auteurs, telles que :
- l’adoption d’une véritable politique du vieillissement actif ;
- la mise en œuvre de cette politique par un ministre qui dispose de véritables moyens d’action et bénéficie de l’appui non équivoque du gouvernement ;
- rendre possible et avantageux, au plan des pensions et de la fiscalité, le report de la retraite ;
- améliorer l’employabilité des aînés et favoriser par des incitatifs leur maintien dans le marché du travail ;
- l’implication de tous les acteurs en cause, le gouvernement, les associations patronales et syndicales, les responsables de la formation, les employeurs et les syndicats locaux.

Compte tenu de la nature et de l’ampleur de ces mesures, le rapport insiste sur l’urgence d’agir.

« Le vieillissement actif et la poursuite du travail ne peuvent être imposés, il s’agit d’un choix qui doit être exercé librement par chacun. Puisque de plus en plus de travailleurs souhaitent justement prolonger leur activité professionnelle, les mesures du passé conçues pour pousser les travailleurs vers la retraite doivent maintenant faire place à des incitatifs qui rendent possible et favorisent leur maintien au travail, selon des conditions adaptées à leurs capacités et leurs aspirations. Il en va de la santé économique du Québec et de la qualité de vie des nos aînés et il s’agit d’une responsabilité partagée entre l’Etat, les employeurs, la société civile et les individus » conclut Claude Castonguay.

*rédigé avec la collaboration de Mathieu Laberge, économiste et directeur de projet au Cirano.

Le CIRANO est un centre interuniversitaire de recherche, de liaison et de transfert des savoirs en analyse des organisations, une voie d'accès aux meilleurs chercheurs dans ce domaine pour toute entreprise ou organisation, tant privée que publique, désireuse de trouver des moyens innovateurs d'améliorer l'efficacité de ses activités

Article publié le 13/01/2010 à 09:13 | Lu 3962 fois