Déremboursement des médicaments anti-arthrosiques : lettre ouverte de l’AFLAR à François Hollande

En France, 10 millions de malades attendent une meilleure prise en charge de l’arthrose. Et cette dernière est mise en péril par le déremboursement de nombreux traitements dédiés à ces patients. Dans ce contexte, l’Association Française de Lutte Anti-Rhumatismale (AFLAR) vient d’envoyer à François Hollande une lettre ouverte pour l’interpeller sur le déremboursement imminent des médicaments anti-arthrosiques.


L’AFLAR (Association Française de Lutte Anti-Rhumatismale) a adressé en 2013 plusieurs courriers au ministre des Affaires Sociales et de la Santé pour l’alerter sur ce contexte défavorable.
 
Ces courriers sont restés sans réponse : l’AFLAR a donc décidé d’adresser une lettre ouverte au président de la République le 12 novembre 2013 et de la publier dans la presse nationale.
 
Depuis 1937, l’AFLAR oeuvre en santé publique pour l’ensemble des patients atteints d’affections ostéo-articulaires. C’est notamment l’unique association reconnue d’utilité publique en France à représenter les patients atteints d’arthrose.
 
Le silence de la ministre des Affaires Sociales et de la Santé remet en question la cause et les fondements de l’association, engagée aux côtés des malades. En publiant dans la presse nationale le 12 novembre la lettre ouverte au Président de la République, l’AFLAR lance un appel au secours pour faire entendre la voix des malades et mobiliser le grand public autour de cette maladie qui est un vrai fardeau. Tout le monde est concerné : l’arthrose touche 17% de la population française et reste la seconde cause d’invalidité en France.
 
Les conséquences du déremboursement des AASAL (Anti Arthrosiques Symptomatiques d’Action Lente)


Les médicaments appartenant à la classe des Anti-Arthrosiques Symptomatiques d'Action Lente (AASAL) sont les seuls traitements ayant reçu une autorisation de mise sur le marché pour le traitement prolongé et symptomatique de l'arthrose. Ces médicaments sont aujourd'hui remboursés au taux de 15% : ils ont certes une efficacité faible ou modérée, mais réel. La Commission de la transparence de la HAS (Haute Autorité de Santé) jugeant le service médical rendu insuffisant, propose donc leur déremboursement.
 
L’AFLAR souligne que l’arthrose est une maladie à multi-facettes avec différents type de douleurs (osseuses, neuropathiques par exemple) et qui s’exprime aussi, différemment selon le stade d’évolution : elle nécessite donc une attaque multi-cibles en associant différentes prises en charge pour avoir une efficacité significative.
 
Le déremboursement à venir des AASAL, du fait qu'il n'existe aucune autre alternative médicamenteuse pour le traitement de fond, va provoquer un report massif vers la prescription prolongée d'antalgiques ou d'anti-inflammatoires non-stéroïdiens.
 
« Ces médicaments utilisés en report, notamment les anti-inflammatoires, selon le Dr Laurent Grange, Président de l’AFLAR, ont des effets secondaires indésirables (toxicité gastrique, rénale, hépatique et cardio-vasculaire) beaucoup plus inquiétants que ceux des anti-arthrosiques ».
 
Il y a actuellement en France près d’un million de consommateurs d'anti-arthrosiques. Le risque d'induire un problème aigu de pharmaco-vigilance avec l'expression de plusieurs milliers de cas graves et de décès est loin d’être négligeable, du fait du report de ces prescriptions. Loin de permettre une économie de 26 millions d’euros , le déremboursement des AASAL va au contraire, générer un coût supplémentaire pour l'Assurance Maladie et pour les patients.
 
Les conséquences du déremboursement de la visco-supplémentation par acide hyaluronique du genou


La viscosupplémentation par acide hyaluronique est à ce jour remboursée à raison d'un traitement par an et par genou. Un déremboursement global aurait pour conséquence là aussi, d'augmenter le recours à des traitements nettement plus iatrogéniques, comme les opioïdes ou les AINS par exemple, et de conduire également à une augmentation du nombre de prothèses posées.
 
On estime que la visco-supplémentation permet d'épargner 19.000 prothèses de genou sur 2,7 ans (coût total d’une prothèse estimé à plus de 11.900 euros). L'économie réalisée par les déremboursements ne compensera pas le surcoût occasionné par la chirurgie et les complications liées aux reports de prescription.
 
Des besoins thérapeutiques largement insatisfaits

En octobre dernier, la première grande enquête nationale sur l’arthrose, réalisée par l’Alliance Nationale Contre l’Arthrose sur le site stop-arthrose.org, a livré des témoignages sur cette pathologie qui affecte considérablement la vie des patients.
 
Ainsi, neuf répondants sur dix sont en quête de solutions pour soulager leurs douleurs et les deux-tiers pour améliorer leur mobilité. Par ailleurs, 70% estiment que le suivi médical devrait être amélioré, voire 85,1% pour ceux dont les revenus sont inférieurs à 1.000 euros par mois. Chez ces derniers, les dépenses liées à l’arthrose génèrent de sérieuses difficultés : dépassements d’honoraires, consultations non remboursées, reste à  leur charge des traitements, orthèses, transports, aides à domicile, aménagements du domicile et du véhicule.
 
Dans ce contexte, le Dr Laurent Grange, rhumatologue se préoccupe pour ces patients : « pour nos décideurs, il n’y a rien à faire contre l’arthrose, parce qu’ils l’associent à la fatalité du vieillissement. Il n’y aurait donc rien à faire pour dix millions de patients ? »

Publié le 19/11/2013 à 10:28 | Lu 1394 fois