De puissants calculs numériques pour prédire les risques d'Alzheimer

Un remède contre la maladie d'Alzheimer ? Cela semble encore très loin, voire impossible pour le moment. Pourtant, un scientifique de l'Institut Informatique Français pense que les avatars générés par les ordinateurs pourraient à terme aider à prédire les risques de développer cette pathologie neurodégénérative. Explications avec le Conseil Européen de la Recherche (ERC).





Les recherches sur les maladies neurodégénératives, et notamment sur la maladie d'Alzheimer, se sont avérées extrêmement frustrantes... De fait, les nombreux essais cliniques ont échoué à plusieurs reprises et encore aujourd’hui, aucun médicament ne peut soigner cette maladie du cerveau qui touche pratiquement 900.000 personnes en France. Certains parviennent tout juste à la ralentir. Ces échecs répétés pourraient être, en partie du moins, imputables à l’accent mis principalement sur la phase clinique de la maladie qui ne commence que lorsque les symptômes se manifestent…
 
On sait pourtant que ces pathologies neurodégénératives commencent bien avant l'apparition de ces premiers symptômes… Au cours de cette phase « silencieuse » et totalement asymptomatique, le cerveau connaît une interaction complexe entre les associations de protéines neurotoxiques, la perte neuronale et les altérations de la structure cérébrale qui causent petit à petit, une déficience fonctionnelle.
 
Dans ce contexte, il est primordial d'avoir un aperçu plus précis de cette phase « silencieuse » afin de mieux comprendre la maladie, de développer d'éventuels médicaments et d'identifier les personnes les plus à risque afin que les traitements puissent commencer le plus tôt possible ; comme souvent, plus la maladie est traitée tôt, plus c’est efficace.
 
Dans cet esprit, Stanley Durrleman, le chercheur responsable du projet LEASP -financé par le Conseil Européen de la Recherche- travaille au développement de la prochaine génération de méthodes statistiques et informatiques qui permettront de construire des modèles numériques du cerveau vieillissant. « Ces avatars numériques de notre cerveau sont pensés pour montrer la manière dont cet organe est structuré, son métabolisme et ses évolutions au cours de la progression de la maladie » précise Durrleman.
 
Durrleman compare le travail de développement de ces avatars à l'enseignement d'une langue à un enfant. « Certains pensent que la construction de ces modèles numériques -ou de ces avatars- n'est pas possible car notre connaissance et notre compréhension du cerveau et des mécanismes de la maladie ne sont pas assez développés. Mais prenons l’exemple suivant : on n’enseigne pas la grammaire et la conjugaison à un enfant qui apprend à parler. Il apprend en répétant et en associant ce qu'il entend au quotidien. Ce n'est que lorsqu’il maîtrise la langue qu’il peut ensuite en comprendre sa structure et ses règles ».
 
Et le scientifique de poursuivre : « En fait, nous allons appliquer le même principe pour bâtir nos modèles numériques : nos algorithmes vont apprendre au fur et à mesure que le cerveau évoluera au cours du vieillissement et en fonction de la progression d’Alzheimer en réassociant les observations découvertes sur les patients qui ont développé la maladie par le passé. Le modèle qui en résultera sera ensuite interprété grâce à de nouvelles hypothèses et pourra être utilisé pour réaliser des pronostics sur les risques de développer Alzheimer chez les autres patients ».
 
A terme, l'objectif de ce travail est de pouvoir reconstituer toutes les étapes de développement d’Alzheimer grâce à l’observation -sur de courtes périodes de progression de la pathologie- d’un grand nombre de personnes atteintes par cette maladie neurodégénérative. 

Article publié le 05/04/2017 à 03:25 | Lu 1669 fois